Avec l’arrivée de la ménopause, des changements hormonaux et métaboliques opèrent, conduisant souvent à une prise de poids. Pour bien gérer cette transition, il est important d’approfondir la compréhension du rapport à son propre corps. Laurence Haurat, psychologue et nutritionniste, répond à vos questions.
« Pourquoi est-ce que je prends du poids au cours de la ménopause ? »
Julia, 51 ans
Laurence Haurat : À ce moment-là, beaucoup d’éléments favorisent la prise de poids : la production d’œstrogènes s’arrête, mais celle de testostérone continue, provoquant une accumulation de masse graisseuse autour du ventre, comme chez les hommes. Cela s’ajoute à la diminution globale du métabolisme ainsi que la sarcopénie : cette diminution de la masse musculaire avec l’âge a pour effet de conduire à un plus grand stockage de graisses à régime égal car les muscles sont les tissus les plus consommateurs d’énergie. D’autres aspects comme des troubles du sommeil peuvent participer à cette prise de poids.
« Est-ce qu’il faut être mince pour être en bonne santé et bien dans son corps ? »
Carine, 53 ans
Laurence Haurat : C’est le poids de la société qui nous donne cette impression. Depuis de nombreuses décennies, nos sociétés sont tournées vers des esthétiques de minceur, qui sont davantage renforcées par les médias et aujourd’hui, les réseaux sociaux. Être mince représente la réussite personnelle et professionnelle qui passe par un bon contrôle de sa vie et donc de son apparence. La minceur est aussi devenue symbole de bonne santé, alors que l’on peut tout à fait être mince et avoir un excès de cholestérol et des problèmes cardiovasculaires. Il est important de rappeler que la moitié des gens dits en surpoids, selon l’indice de masse corporelle, sont en bonne santé.
Il est à noter qu’au siècle dernier, avoir de l’embonpoint était signe de richesse et de réussite, car cela montrait que l’on avait les moyens, ce qui s’est inversé quand la nourriture est devenue plus accessible, abondante, et moins chère. À cela s’ajoute que nous sommes dans une société âgiste : une femme dite belle est jeune, fertile et séduisante, et une femme marquée par le vieillissement et une éventuelle prise de poids est considérée comme obsolète.
À savoir
Même si peu d’études et de résultats sont menés sur les aliments les plus à même de répondre aux besoins nouveaux de la femme en ménopause, un consensus émerge autour de l’alimentation méditerranéenne qui fait la part belle aux légumes (anti-oxydants), aux graines (céréales, féculents, nuits) et aux petits poissons gras (omega 3).
Entre 42 et 50 ans, la prise de poids moyenne est de 0,8 kg par an et même 1,5 kg pour 20 % des femmes.
Source : Ameli.fr
« Pourquoi ai-je du mal à gérer mon régime alimentaire en ce moment ? »
Mathéa, 50 ans
Laurence Haurat : Arrivée à cet âge, une femme a souvent une charge mentale très élevée, entre la gestion de la conjugalité (souvent compliquée à cette période), parfois encore des enfants à charge et une vie professionnelle dense. À cela s’ajoute mouvements d’humeur, d’irritabilité, des douleurs, des bouffées de chaleur, un sommeil altéré, qui ne la mettent donc pas dans les conditions idéales pour s’engager dans la gestion optimale d’un régime. De plus, de nombreuses femmes ont déjà fait différents régimes restrictifs et se sont confrontées à des difficultés conduisant à des frustrations, des rebonds de poids, etc. Ce qui peut être décourageant.
« Quel est le bon régime à adopter ? »
Florence, 52 ans
Laurence Haurat : Le rapport à l’alimentation est complexe et il est important de comprendre nos comportements alimentaires de manière plus détaillée. Nos routines alimentaires sont généralement installées depuis longtemps et l’envie de manger peut provenir de sources variables comme la sensation de faim, l’envie gourmande, le besoin de réconfort ou juste de simples habitudes. Les comportements alimentaires proviennent donc de signaux d’ordres psychoémotionnels qui font partie de l’équilibre alimentaire.
Un régime méditerranéen est à privilégier, mais il ne s’agit pas simplement de manger tant de grammes de viande, de poisson, de féculents et de légumes. Il s’agit de chercher et d’adapter sa nutrition pour être à un bon équilibre qui est variable selon les individus et donc de s’écarter d’injonctions trop générales. Par exemple, certains individus ne peuvent pas manger autant de légumes que d’autres, pourtant très recommandés de manière générale, car cela peut conduire à un mauvais transit.
« Comment puis-je aborder sereinement cette période ? »
Sarah, 49 ans
Laurence Haurat : La santé doit être considérée de manière globale. Il est essentiel de savoir ce qui est bon pour soi et sa santé mentale : ne pas apprécier son corps et se sentir discriminée, jugée, et culpabiliser de ses propres comportements n’aide pas à prendre correctement soin de celle-ci, ce qui peut engendrer des conséquences corporelles avec des somatisations. Nous ne pouvons pas exiger de son corps qu’il soit le même que 20 ans auparavant, car cela sera toujours source de souffrance. La première étape consiste donc à se défocaliser du poids pour aborder des questions plus globales sur la vie personnelle, conjugale, professionnelle. Souvent les comportements compulsifs et délétères dans l’alimentation, comme dans le reste, proviennent de rapports perturbés à soi-même, et c’est sur cela qu’il s’agit de travailler en premier pour atteindre le corps dans lequel on se sent bien.
La ménopause est un carrefour où on a la chance de pouvoir se poser des questions assez existentielles.
Nous ne pouvons pas exiger de son corps qu’il soit le même que 20 ans auparavant, car cela sera toujours source de souffrance.
La Révolution ménopause, le dernier livre de Laurence Haurat paru en 2023, contient des clés pour traverser cette période avec plus de sérénité. L’autrice poste régulièrement des conseils sur instagram sous le compte @la_psy_des_kilos
Insertion de la 2ème image avec la légende suivante : Un autre ouvrage de la psychologue nutritionniste paru en 2020 : Et si vous trouviez (enfin) votre poids idéal est un livre outillant pour trouver ses propres solutions.
Par Antonin Counillon





