Votre grand-mère a maigri, elle manque d’appétit, ne semble plus éprouver de plaisir à table et la preuve : son frigo est vide ! Elle est peut-être, comme 2 millions de Français, dénutrie. On vous dit tout pour l’aider de votre mieux.
Qu’est-ce que la dénutrition ?
La dénutrition est la conséquence d’un apport nutritionnel trop faible par rapport aux besoins de l’organisme. Elle peut être liée à une perte d’appétit (par exemple à cause d’une maladie) ou divers facteurs (troubles de la mobilité, bucco-dentaires, isolement social, précarité, etc.).
Quels sont les symptômes ?
La dénutrition se traduit par une perte de poids, que le malade soit mince ou en surpoids, et, à terme, une perte des forces. Elle est majoritaire chez les personnes âgées, mais elle peut aussi concerner les adultes ou les enfants. Des changements de comportement peuvent aussi alerter.
Comment la diagnostique-t-on ?
Il y a un moyen très simple pour dépister la dénutrition : la pesée. Chez tout adulte, une perte de poids (non souhaitée) supérieure à 5 % du poids en 1 mois, ou 10 % en 6 mois, est un signe de dénutrition. De même, il faut consulter en cas d’indice de masse corporelle inférieur à 18,5 chez l’adulte ou 22 chez les personnes de plus de 70 ans.
→ Dans tous les cas, au-delà de 3 kg de perte de poids par rapport à son poids habituel, il est utile de consulter son médecin traitant pour en définir les causes.
Quelles peuvent être les causes ?
Difficile de trouver une seule cause… D’autant qu’elles peuvent être multiples et liées. Par exemple, en cas de maladie, la prise de certains médicaments peut faire varier l’appétit ou le goût, voire entraîner des douleurs. Certaines maladies ont également des conséquences sur la déglutition ou la capacité à mâcher.
Les sévères conséquences de la dénutrition
Car si la perte de poids n’est pas toujours négative, par exemple en cas de surpoids, elle peut avoir des effets importants sur la santé générale de la personne. Une perte de poids rapide et incontrôlée peut affaiblir l’immunité et donc augmenter son risque d’infection. Autre conséquence : la perte de masse musculaire qui peut augmenter le risque de chutes et donc de fractures. La dénutrition vient aussi aggraver des pathologies existantes. Sans compter la baisse de moral et l’augmentation du risque de dépression…
→ Il ne faut donc pas laisser une personne en état de dénutrition, d’autant que des solutions existent !
Le vieillissement : une cause à part entière !
En vieillissant, le corps perd des capacités physiques telles que la motricité ou des capacités cognitives, mais également une diminution de nos sensations, notamment de faim et de soif, qui influencent notre comportement alimentaire : nous ne faisons plus les mêmes courses, n’avons plus forcément de pulsion alimentaire naturelle, etc. D’où l’importance de faire davantage attention à l’alimentation des seniors, car cela évitera la voie de la dénutrition.
→ Par ailleurs, sauf raison médicale précise, il est déconseillé de suivre un régime restrictif passé 50 ans. En effet, le corps qui vieillit a besoin de plus de nutriments et, pour citer le Pr Éric Fontaine, président fondateur du Collectif de lutte contre la dénutrition : « passé un certain âge, maigrir, c’est mourir ! »
Quelles solutions contre la dénutrition ?
Il est important de consulter son médecin en cas de perte de poids inexpliquée. En effet, elle peut être le symptôme d’une pathologie ou un effet secondaire d’un traitement, par exemple. Une fois la cause établie, il faut reprendre le poids perdu.
Pour ça, une solution qui peut paraître simple : manger tout ce qui est déconseillé lors des régimes ! Il est indispensable d’enrichir l’alimentation, à chaque repas. Ainsi, le lait écrémé peut être remplacé par du lait entier, les plats agrémentés de crème entière, les légumes par de l’huile ou d’autres matières grasses, etc.
Comment retrouver la joie de manger ?
Il est utile de commencer par chercher la ou les causes potentielles qui ont mené à cette voie de la dénutrition. Cela permettra de trouver des solutions pour les résoudre.
→ Causes psychologiques : moral, anxiété, solitude, rythme de vie, troubles psychiques (phobie, troubles de l’alimentation), routine…
→ Causes médicamenteuses : effets secondaires de traitements chroniques, amincissants, de chimiothérapie…
→ Causes physiologiques : troubles endocriniens, fonctionnels, anatomiques (déglutition), neurologiques, digestifs, infections, maladies chroniques ou aiguës, fatigue…
→ Causes environnementales : arrêt du tabac, vieillesse, douleur, manque d’activité, perte des dents…
4 idées reçues sur la dénutrition
La dénutrition touche uniquement les personnes âgées
Faux ! Quel que soit l’âge, une perte de poids involontaire n’est pas normale, il est indispensable d’en connaître la cause car la dénutrition peut toucher tous les âges.
La dénutrition est incompatible avec toute activité physique
Au contraire, l’activité physique adaptée et l’alimentation limitent la fonte musculaire, favorisent la guérison et accélèrent la convalescence.
La dénutrition ne concerne pas les personnes en surpoids ou obèses
Faux ! La dénutrition touche aussi bien les malades en surpoids ou obèses qu’en bonne santé. Toute perte de poids importante, malgré un taux de masse grasse important, peut témoigner d’une dénutrition à surveiller.
Les personnes âgées ont besoin de manger moins de viande
C’est le contraire : les besoins des personnes âgées en protéines sont supérieurs à ceux des adultes plus jeunes pour maintenir leurs muscles et leur forme. Il leur est recommandé de consommer une portion de viande, œuf ou poisson deux fois par jour.
Moins on mange, moins on a faim !
Vous avez peut-être vous aussi entendu cet adage par votre grand-mère qui vous resservait de la blanquette pour la troisième fois… Elle n’avait pas totalement tort. Car si l’organisme n’a pas assez d’apports, il va aller puiser dans les réserves et donc favoriser l’amaigrissement.
La solution de manger de plus grandes quantités est souvent difficile pour les personnes dénutries. Dans ce cas, il est utile d’augmenter la qualité des repas : des repas plus riches pour plus de calories et ainsi permettre de limiter la perte de poids. Voici quatre conseils :
- Favoriser les aliments caloriques : charcuterie, beurre, crème, œuf, fromage… Il n’y a pas de risque nutritionnel en cas de dénutrition puisque les personnes en mangent en petite quantité.
- Prendre trois repas par jour et des collations supplémentaires ou, par exemple, des compléments nutritionnels oraux (parlez-en avec votre médecin car ils sont disponibles uniquement sur ordonnance).
- Consommer les aliments riches en début de repas, par exemple commencer par la charcuterie ou le fromage, et garder la salade ou les fruits (partie peu calorique) pour la fin du repas.
- Pratiquer une activité régulière : la marche, le jardinage, la promenade… Elle permet de maintenir sa masse musculaire et sa vie sociale, permettant ensuite de partager pourquoi pas un bon repas ou goûter !
Non, il n’est pas normal de maigrir en vieillissant !
Des signes peuvent révéler un amaigrissement :
Des vêtements qui paraissent plus larges qu’avant
La personne met une ceinture ou des bretelles alors qu’elle n’en avait pas besoin jusqu’à présent
Les bijoux, notamment les bagues, sont moins serrés, etc.
Un visage plus fin, qui se creuse
Un dentier qui tient mal (car les gencives aussi s’amincissent)
Lors des repas, des indices sont aussi repérables
Une perte d’appétit chez une personne qui mangeait davantage
Une personne ne se met plus à table
Une personne ne termine pas son assiette, se sert des petites portions ou indique qu’elle mange moins qu’avant, par exemple
Un réfrigérateur vide ou avec des produits périmés
Les personnes dénutries le sont parfois à leur insu ! De nombreuses personnes, notamment âgées, ne se pèsent pas et donc n’ont pas forcément conscience d’être dans un processus de dénutrition
Se peser à la maison, chez le médecin ou en pharmacie
Nous n’avons pas tous une balance à la maison, il est donc possible de se rendre en officine pour se faire peser. Les pharmaciens pourront d’ailleurs vous aider à le faire correctement, et à évaluer une éventuelle perte de poids. De plus, ils pourront vous prêter une oreille attentive, car souvent les problèmes commencent à se résoudre lorsque l’on en parle, et vous orienter éventuellement vers le bon professionnel de santé. Enfin, si la perte d’appétit ou de poids figurent parmi les effets secondaires potentiels d’un de vos médicaments ils sauront vous le dire.
Les professionnels de la joie de manger
En cas de dénutrition, un professionnel de la nutrition (nutritionniste, diététicien, mais aussi un gériatre par exemple) peut vous aider à enrichir vos repas, les rendre plus attrayants et vous diriger vers la joie de manger ! Il est aussi indispensable de demander conseil à son médecin traitant, car dans le cas où les mesures d’enrichissement alimentaires ne suffisent pas à éviter l’amaigrissement, il est nécessaire de mettre en place d’autres mesures. Par exemple, la prescription de compléments nutritionnels oraux (CNO) riches en énergie et en protéines peut être recommandée en plus des repas enrichis.
Ensuite, le pharmacien prend le relai : il va délivrer des CNO selon les attentes et les goûts des patients. Par exemple, préférez-vous des CNO salés ou sucrés ? Quelle texture (gelée, crème…) ? A chaque délivrance, le pharmacien fera le point sur les CNO qui ont été appréciés et qui sont donc efficaces dans la prise en charge. Il ne faut pas hésiter à demander au pharmacien d’autres textures si l’une ne convient pas, si l’on préfère des CNO à prendre froid ou chaud, salés ou sucrés, etc. Chez les patients atteints de cancers, il faut adapter la texture au risque de fausses routes aux liquides (privilégiez les crèmes) et dysphagies (privilégiez les CNO épaissis et non liquides). Enfin, varier les textures et les parfums pour éviter la lassitude et l’abandon.
Si la perte de poids continue malgré vos efforts, consultez votre médecin traitant pour chercher des solutions plus adaptées
Les CNO en pratique
Les CNO peuvent également être intégrés dans des recettes. Par exemple, si vos grands-parents en prennent, vous pouvez les cuisiner pour enrichir leurs plats.
Quelques exemples :
→ Superposer plusieurs crèmes dessert CNO pour créer un entremet,
→ Préparer une sauce salée à l’aide des CNO en poudre,
→ Mixer des fruits et une boisson CNO pour un milkshakes,
→ Ajouter un yaourt CNO à une préparation de gâteau…
Attention ! Les CNO ne sont pas des substituts de repas. Ils doivent être pris en plus des repas habituels (2 heures avant ou 2 heures après, afin que l’appétit soit préservé aux heures des repas).
Par Juliette Dunglas & Gaëlle Monfort





