Championne de France de planche à voile en 1986, l’animatrice et sportive Nathalie Simon a brisé le silence en 2023 sur la maladie dont elle souffre depuis plus de 20 ans : le vitiligo. Une pathologie auto-immune à l’origine d’une dépigmentation de la peau. Témoignage.
Vocation Santé : Quand votre maladie est-elle apparue ?
Nathalie Simon : C’était en 1998, juste après la naissance de ma fille. Car comme beaucoup de maladies auto-immunes, le vitiligo se déclenche suite à un stress important ou un gros bouleversement hormonal comme un accouchement. Sachant qu’en parallèle, j’ai une autre maladie auto-immune depuis mes 22 ans au niveau de la thyroïde, la maladie de Basedow, qui est apparue lorsque j’ai débuté la compétition et qui peut être associée au vitiligo.
Le vitiligo vous a-t-il posé des problèmes dans votre métier d’animatrice ?
Comme la maladie débute progressivement et qu’au début, les premiers signes sont faibles, j’ai vite eu tendance à camoufler mes taches avec du maquillage. D’autant plus que je suis dans un métier d’image où il faut être parfait : cacher ses rides, cacher le moindre défaut… ça ne laisse pas la place à des taches blanches sur les mains !
“Dans un métier d’image où il faut être parfait : cacher ses rides, cacher le moindre défaut… ça ne laisse pas la place à des taches blanches sur les mains. “
La cachiez-vous également dans vos autres activités publiques ?
Je le cachais partout, sauf chez moi. J’étais dans un vrai rituel de beauté, j’avais ma petite palette de maquillage et je cachais les marques sur mes mains. Mais je le camouflais aussi parce que les gens ont souvent un regard interrogateur, insistant, quand on a une différence. Ce n’est pas si évident à accepter.
Vous avez finalement décidé d’arrêter de camoufler vos taches blanches. Pourquoi ?
C’est ma fille qui, l’année dernière, m’a dit « mais maman je te vois avec tes palettes, tes trucs, tu te prends la tête alors qu’en fait c’est beau, on dirait la carte du monde ». J’ai réfléchi à ce qu’elle m’a dit, et je me suis dit qu’elle avait raison ! Alors, ce n’est pas forcément très beau, mais si je me familiarise avec mon vitiligo, si je le trouve joli, si je me mets à l’aimer, ce sera peut-être plus simple. J’ai donc fait la paix avec mon vitiligo. Mais ça ne veut pas non plus dire que je n’essaye pas de repigmenter ma peau : j’essaye des traitements, je m’informe sur la maladie. Arrêter de maquiller mes taches, ça veut surtout dire que je ne les cache plus. Le lendemain de cette décision, j’étais en tournage et j’ai dit au réalisateur : « on ne cache pas les mains ».
La maladie a-t-elle été source de stress ? A-t-elle eu des répercussions psychologiques sur vous ?
Oh non, je suis quelqu’un d’assez solide ! En revanche, ce qui me prenait la tête, c’est d’avoir les mains maquillées avec du fond de teint : on en met partout. Surtout que je fais des émissions où je suis souvent en action ou dans l’eau. Idem pendant la période du Covid, où il fallait sans cesse se laver les mains. Là, ça a été le cauchemar. Et ça a probablement été un élément déclencheur aussi, car ça devenait intenable.
Le sport vous a-t-il aidé ?
Oui, probablement car cela m’a aidé à me forger un tempérament assez fort. C’est souvent la norme dans mon métier : cacher ses défauts. Et aujourd’hui, nous sommes davantage dans une période où les vieux ont la côte et les gens qui sont différents l’affirment. Finalement, la normalité n’est plus à la mode. C’est génial, je suis dans l’air du temps (rires). Aussi, j’ai les « pieds sur mer », j’ai un entourage aimant, mon mari s’en fiche, ma fille aussi. J’étais la seule personne à trouver le vitiligo moche en réalité.
Quel message aimeriez-vous faire passer aux autres personnes qui souffrent de vitiligo ?
D’expliquer au maximum ce que l’on a. Car déjà ça permet de verbaliser. Dès qu’on sent une interrogation, il faut l’expliquer. Notamment aux enfants, qui sont sans filtre, ou à ceux qui craignent que le vitiligo soit contagieux, alors que pas du tout. Ensuite, je leur conseille d’être informés, d’être acteurs de leur maladie. Car même si elle ne vous empêche pas de vivre, elle peut être un frein social. Surtout à l’adolescence, où le moindre défaut peut vite être vécu comme un drame. Le vitiligo ne doit pas être rédhibitoire pour une vie épanouie. Et je le sais très bien, car je vis avec ! Donc si avec ma petite notoriété, je peux aider… Je reçois d’ailleurs beaucoup de témoignages, de gens qui me posent des questions sur les réseaux sociaux. J’invite souvent à aller sur le site de l’Association Française du Vitiligo qui est très dynamique et qui informe. Voilà mon message : ne renoncez pas, surtout ne vous planquez pas, il y a des traitements qui arrivent, ça évolue.
Qu’avez-vous prévu cet été pour les Jeux olympiques ?
Je ferai le Marathon pour tous, qui aura lieu dans la soirée du 10 août prochain, sur une partie de l’itinéraire de la marche des femmes du 5 octobre 1789. Le départ se fera de l’Hôtel de Ville de Paris, pour passer par Versailles, là où se sont arrêtées les manifestantes, et se terminer aux Invalides. Ça va être sympa !
Un premier traitement disponible
Maladie de la peau, le vitiligo se caractérise par l’apparition progressive de taches blanches dues à la disparition des cellules responsables de la pigmentation, les mélanocytes, en lien avec un dysfonctionnement du système immunitaire. Depuis le 31 janvier 2024, un traitement en crème est disponible pour certaines formes de vitiligo avec atteinte du visage : Opzelura. Une date « à marquer d’une pierre blanche pour les taches blanches du vitiligo en France », s’était réjouie l’Association Française du Vitiligo. Il s’agit en effet de la première crème spécifiquement indiquée dans cette maladie. Pour l’instant, ce traitement est uniquement disponible en pharmacies hospitalières sur prescription d’un dermatologue.
Propos recueillis par Julien Dabjat





