L’experte : Isabelle Derrendinger est secrétaire générale du Conseil national de l’Ordre des sages-femmes.
Si leurs noms sont connus de toutes les jeunes filles et femmes, leur utilisation est parfois méconnue. Nous faisons le point sur les différentes protections hygiéniques, sur les avantages et inconvénients de chacune, ainsi que les risques potentiels à les utiliser grâce aux données d’un rapport de l’Anses de 2016.
Au fait, à quoi servent les règles ?
À chaque cycle, un ovocyte est mené à maturité dans les ovaires pour être expulsé dans l’utérus et potentiellement fécondé par un spermatozoïde afin de mener une grossesse. Pendant la maturation de l’ovocyte, l’utérus doit, lui, se préparer à recevoir ce potentiel oeuf pour ce que l’on appelle la nidation. Pour cela, l’endomètre, la partie interne de l’utérus, s’épaissit sous l’effet des hormones. Lorsqu’il n’y a pas de fécondation une fois l’ovocyte expulsé dans l’utérus, l’endomètre se délite pour revenir à l’état initial et cette évacuation des tissus de l’endomètre a lieu sous la forme qu’on nomme règles, également appelées menstruations. Elles sont composées de fragments de l’endomètre, de cellules de la muqueuse utérine et de sang. Le développement de cette muqueuse est unique et elle peut être plus ou moins épaisse, ce qui explique que certaines femmes ont des règles courtes et d’autres plus longues.
L’avis de notre experte : « Les règles sont donc le signal qu’il n’y a pas eu de fécondation et que la femme n’est pas enceinte. Elles n’ont pas un rôle de “nettoyage du corps”, le sang menstruel n’est pas impur comme on peut parfois l’entendre ! Et les règles ne sont pas automatiquement synonymes de douleur : celle-ci peut être le symptôme d’une maladie sous-jacente (endométriose, fibromes, etc.). Il faut consulter ! »
Qu’est-ce que le syndrome du choc toxique ou choc toxique menstruel ?
C’est une infection liée à une toxine sécrétée par une bactérie, le staphylocoque doré, qui est libérée dans le sang. Cette toxine, si elle n’est pas neutralisée par le système immunitaire ou la prise d’antibiotiques, peut entraîner un choc toxique potentiellement mortel.
L’avis de notre experte : « C’est très rare ! En France, on compte 20 cas par an et tous ne sont bien entendu pas mortels ni responsables d’amputation comme on a pu le voir dans les médias ! La moitié de ces chocs toxiques sont conjoints à la présence de menstruations. Il faut aussi savoir qu’une personne sur trois porte cette bactérie sans être malade, sur la peau, dans le nez, dans la gorge, etc. (d’où l’importance de l’hygiène lors du changement de protection). Dans ce cas-là, on dit que l’individu est porteur sain, mais elle peut devenir agressive dans certaines situations particulières. »
Parmi les facteurs de risque connus :
- un antécédent de choc toxique,
- une vaginite (attention aux pratiques qui peuvent les favoriser comme le nettoyage trop agressif du vagin : il n’est pas et n’a pas à être stérile) ou des lésions vaginales,
- un système immunitaire affaibli (maladies chroniques, infections, etc.),
- une utilisation prolongée d’un tampon ou d’une cup au-delà des recommandations (4 heures en moyenne, il faut donc éviter les tampons hyperabsorbants quand on a un flux léger en pensant le changer moins souvent, ou avoir deux cups pour la stériliser à chaque fois),
- un mauvais lavage des mains avant le changement de protection.
En cas de fièvre, vomissements, diarrhées, fatigue inexpliquée, maux de tête, maux de gorge, douleurs musculaires et éruptions cutanées pendant les règles (et sans autres causes explicatives), il faut consulter rapidement, car ce sont des symptômes potentiels du choc toxique. La prise en charge par antibiotiques en perfusion permet de neutraliser la bactérie.
Ne plus avoir de règles ?
L’avis de notre experte : « Il y a plusieurs origines possibles à l’arrêt des règles : la grossesse et la ménopause (naturelle ou induite par exemple par l’ablation des ovaires) en sont les principales. Mais tant que l’on a des ovocytes, en dehors de tout contexte pathologique, notre utérus est programmé pour préparer une grossesse et donc développer la muqueuse endométriale à l’origine des règles lorsqu’il n’y a pas de fécondation. Sinon, il y a des solutions pour diminuer le volume des règles ou les arrêter : les contraceptifs hormonaux, dont les dispositifs intra-utérins hormonaux et les pilules prises en continu, qui vont entraîner une absence de règles. Ce sont des méthodes sans risque et réversibles. »
À savoir
Il est important de savoir que les règles sous pilule sont totalement artificielles : elles ne sont pas liées à une non-fécondation puisqu’il n’y a pas de maturation d’ovocyte, mais simplement la conséquence de l’arrêt de la prise de la pilule. L’arrêt entre deux plaquettes n’est d’ailleurs pas obligatoire et il est possible de ne pas faire d’interruption sans risque. N’hésitez pas à en discuter avec votre sage-femme, votre gynécologue ou votre médecin traitant.
Les bonnes pratiques pour éviter un SCT
- Respecter la fréquence de changement de chaque protection (4 à 6 heures)
- Se laver les mains avant et après le changement
Les protections hygiéniques externes
Les serviettes hygiéniques
Ce sont les protections les plus utilisées tous âges confondus. Elles sont formées de plusieurs couches :
– Un voile de surface (A) : cette couche apporte douceur et confort et permet de laisser passer le flux menstruel rapidement dans la couche inférieure.
– Une couche d’acquisition (B) et de distribution qui transfère rapidement les menstruations à la zone de stockage.
– Un matelas absorbant (C), qui est composé de fibres de cellulose (absorption des liquides) et parfois de polymères superabsorbants (SAP), destiné à retenir les liquides. Plus il y a de SAP, plus la serviette est absorbante et plus elle est fine.
– Une enveloppe extérieure (D) imperméable pour retenir l’humidité à l’intérieur de la serviette. Elle est composée de polyéthylène et/ou de polypropylène.
– Un papier adhésif ou bandelette siliconée (E) pour fixer la serviette à la lingerie.
Dans certaines serviettes ou certains protège-slips sont ajoutés par les fabricants des parfums ou des neutralisateurs d’odeur, des lotions (ex. aloe vera, etc.) et des pigments.
La culotte menstruelle
La culotte menstruelle est la dernière nouveauté sur le marché et connaît un franc succès. Il s’agit d’une culotte très absorbante et qui est conçue pour retenir l’équivalent de plusieurs tampons ou serviettes selon les marques. De nombreuses marques françaises existent : Fempo, Saforelle, Réjeanne, etc. pour les plus connues. Lavable, elle peut être réutilisée une centaine de fois (soit pendant plusieurs années), et est donc également un argument alliant écologie et économie pour de nombreuses femmes. La plupart des marques revendiquent une protection durable pendant 12 heures, avec ou sans autre protection. Leur prix oscille entre 20 et 40 euros la culotte, ce qui est un investissement, mais qu’il faut évaluer sur le long terme.
Ces culottes se composent :
- d’une couche drainante pour amener le liquide vers l’intérieur,
- d’une couche absorbante (avec absorption variable selon les modèles)
- et d’une membrane inférieure qui garantit l’imperméabilité de la culotte.
Protections jetables ou lavables ?
Il existe également des serviettes, protège-slips lavables qui évitent de jeter du plastique souvent peu recyclable. Ces produits sont désormais facilement disponibles, sur internet, en pharmacie ou magasin bio, de 1 à 5 euros la serviette selon la qualité des composants. Là encore, l’argument écologique et économique est mis en valeur, mais pas seulement. Certaines femmes convaincues expliquent qu’avec les protections lavables, elles n’ont pas d’allergie aux matériaux qui les composent, évitent irritations et démangeaisons. Du point de vue hygiénique, l’important est de respecter les règles d’usage : changement régulier, lavage rigoureux en machine et séchage total avant utilisation.
Les protections hygiéniques internes
Les tampons
Très utilisés, les tampons ont été au centre d’une polémique récente liée à leur composition parfois mystérieuse et au syndrome du choc toxique qu’ils peuvent entraîner. L’Anses a demandé aux fabricants plus de transparence et a, dans son dernier rapport, annoncé que les composants étaient sûrs pour les femmes les utilisant. Les tampons sont formés d’ :
– un voile qui entoure le corps absorbant pour faciliter la mise en place et le retrait du tampon,
– un corps absorbant permettant l’absorption du sang,
– une cordelette, parfois colorée, servant au retrait du tampon,
– un applicateur, dans certains modèles, qui aide au positionnement du tampon.
La coupe menstruelle ou cup
C’est une nouveauté dont on a beaucoup entendu parler ces dernières années. Faite en silicone médical, la coupe se place dans le vagin et a pour objectif de recueillir le sang menstruel qui sera jeté dans les toilettes. Si elle permet une absorption plus importante que les tampons, elle doit néanmoins être vidée et nettoyée plusieurs fois par jour, comme les tampons, toutes les 4 à 6 heures.
Les fabricants indiquent une vidange de la cup toutes les 12 heures, mais il est préférable de s’en tenir à 4 heures entre deux vidanges selon notre experte : « Nous recommandons de ne pas l’utiliser la nuit et de préférer les protections externes pour limiter les risques de choc toxique. »
La composition des protections
L’avis de notre experte : « Il existe depuis quelques années une préoccupation écocitoyenne des femmes sur le contenu des protections hygiéniques. Une évaluation faite par l’Anses, l’autorité en charge de l’évaluation du risque sanitaire, a reconnu que ces protections contenaient des dérivés des produits pétroliers. Elle a recommandé aux fabricants d’améliorer la qualité des matières premières pour limiter la présence de ces substances, même si celles-ci sont considérées comme résiduelles et sans effet sur la santé de la femme ou sur l’environnement. »
Par Gaëlle Monfort





