Selon la définition donnée en 1979 par l’IASP (International association for the study of pain), la douleur est « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, liée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite en termes d’une telle lésion ».
Aigüe, elle est physiologique et alerte l’organisme sur la mise en péril de son intégrité (c’est elle qui nous fait retirer notre main du feu). Chronique, elle relève en revanche de la maladie et peut-être due à la perturbation du mécanisme de sa genèse. Dans les deux cas, le processus est le même : la douleur, c’est (presque que) dans la tête.
Mécanisme de la douleur
1. Au niveau périphérique (peau)
La douleur prend naissance au niveau de la peau, du derme plus précisément, où siègent les récepteurs à la douleur (aussi appelés nocicepteurs) qui ne sont en réalité autres que les terminaisons nerveuses des neurones spécifiques de la douleur (neurones nociceptifs). Ces derniers étant les premiers neurones de la chaîne de conduction de la douleur, on les appelle aussi protoneurones.
2. Au niveau central (moelle épinière et cerveau)
Une fois les fibres nerveuses des protoneurones stimulées, l’influx nerveux remonte vers la substance grise de la moelle épinière où les protoneurones font synapse avec les deuxièmes neurones de la douleur, les deutoneurones. Ainsi stimulés, les deutoneurones envoient alors leur arborisation vers le cerveau où, à l’issue d’une deuxième et dernière synapse avec les troisièmes neurones de la douleur, l’information est transmise au niveau cortical pour être traitée.
3. Les neurones de la douleur
Les neurones sont des cellules nerveuses véhiculant leur information sous forme d’influx électrique. Leur vitesse de conduction dépend essentiellement de leur dia¬mètre et de leur association éventuelle à une gaine de myéline, qui est une couche isolante enrobant certains neurones pour les protéger.
Cette vitesse sera d’autant plus élevée que le neurone aura une gaine de myéline et que son diamètre sera important.Tout au long de la chaine de conduction de la douleur, plusieurs neurones interviennent pour trans¬mettre l’information depuis la périphérie, où a lieu le stimulus douloureux, et le cerveau, où l’information est traitée.
- Les protoneurones qui relient la zone touchée à la moelle épinière sont au nombre de deux : les neurones Aδ, qui véhiculent une douleur rapide et localisée et les neurones C, qui véhiculent une douleur plus lente et plus diffuse.
- Les deutoneurones relient la moelle épinière à une région du cerveau appelée le thalamus.
- Les neurones thalamocorticaux, issus du thalamus, envoient leurs projections vers différentes aires corticales et l’information est analysée et donne lieu à une réponse.thalamus, envoient leurs projections vers différentes aires corticales et l’information est analysée et donne lieu à une réponse.
4. Les neurotransmetteurs de la douleur
Les neurotransmetteurs sont des molécules de signal retrouvées au niveau des synapses et libérées par un neurone dit pré-synaptique à destination d’un neurone dit post-synaptique. Grâce à elles, l’information n’est pas perdue entre deux neurones, mais transmise de l’un à l’autre sous forme chimique.
La chaîne de conduction de la douleur ne com¬prenant pas moins de deux synapses notables, on compte plusieurs neurotransmetteurs qui transmettent l’information nociceptive :
- Les acides aminés excitateurs (aspartate, glutamate)
- Les acides aminés inhibiteurs (glycine, GABA)
- Les neuropeptides (substance P, somatostatine)
Régulation de la douleur
Théorie du « portillon »
Cette théorie, édictée en 1965 par deux scientifiques anglo-saxons (Melzack et Wall), consiste grossièrement à dire que la douleur serait une sensation qui n’apparaitrait que lorsque la somme des informations nociceptives submergerait celles des informations non nociceptives. Schématique¬ment, il existerait au niveau de la moelle épinière, où s’effectue le premier relais de la chaîne de conduction de la douleur, un petit portillon qui serait fermé à l’état de base par tous les stimuli non douloureux perçus par l’organisme (touché, température agréable, vent). Ce dernier resterait clos tant que les informations positives resteraient majoritaires au détriment des informations négatives.
En revanche, dès lors que les secondes l’emporteraient sur les premières, le portillon ne saurait résister et cèderait, laissant la douleur gagner le cerveau, et donc exister. Il faut finalement voir ce portillon comme les grandes portes de fer et de bronze du Tartare, gardant le monde des mortels des terribles Titans immortels.
Maxime Deloupy