Une migraine, un coin de porte, de l’eau trop chaude… les sources de douleur peuvent surgir de toute part. Si les adultes sont souvent capables d’y apporter une solution ou de la gérer, les enfants ne vivent pas ces expériences de la même manière. La Dr Catherine Devoldère, présidente de l’association Sparadrap, nous en apprend plus sur la douleur des jeunes enfants.
L’experte
Dr Catherine Devoldère
Pédiatre, responsable du centre de cancérologie pédiatrique du CHU d’Amiens
Consultation en douleur chronique chez l’enfant et l’adolescent
La douleur est « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable, ces deux composantes sont indissociables ».
Comprendre et évaluer la douleur de l’enfant n’est pas facile. Non seulement elle n’est pas la même pour tous mais, surtout, elle possède une dimension émotionnelle très puissante et souvent négligée. Il est ainsi facile d’imaginer que la douleur chez les enfants est vécue très différemment de la nôtre, adultes ou jeunes adultes. C’est aussi une épreuve pour les personnes prenant en charge un enfant qui n’a pas complètement acquis le langage verbal.
La douleur
La Dr Catherine Devoldère, pédiatre et spécialiste de la douleur, explique que « les voies physiologiques de la douleur sont là à la naissance et l’enfant, dès 18 mois, peut localiser sa douleur et même celle des autres. Vers 2 ans, il pourra en plus l’associer à des mots ». La composante sensorielle de la douleur peut être soulagée grâce à des antalgiques, des crèmes anesthésiantes ou encore une compresse froide. Il est ainsi possible d’agir dessus, mais cela n’aura aucun effet sur la composante émotionnelle. Pourtant, « un enfant rassuré aura moins mal ». En effet, dans notre perception de la douleur, la peur, l’anxiété ou l’appréhension peuvent jouer des rôles insidieux qui suffisent à augmenter l’intensité de la souffrance. Ceci est particulièrement vrai chez les enfants qui ne peuvent pas rationaliser, comme un adulte le ferait, et ne comprennent pas forcément pourquoi ils ont mal ni comment ils pourraient soulager la douleur avec des médicaments, par exemple.
Comment les enfants vivent-ils la douleur ?
Une douleur, qu’elle puisse paraître anodine ou plus importante, véhicule chez l’enfant beaucoup d’anxiété et d’incompréhension. Outre les sensations physiques qu’il ressent, la perception finale est en fait décuplée par la dimension émotionnelle. La place des parents dans l’expérience douloureuse des enfants est donc centrale. Lors de l’exécution d’actes médicaux, voire chirurgicaux, la présence des parents a souvent été discutée, car certains pensent que cette dernière ne fait qu’accentuer l’état d’agitation de l’enfant. Catherine Devoldère nous confie sur ce point que, pour elle, les parents sont d’une aide immense dans la prise en charge des enfants. « Le rôle des parents doit être clair : ils sont là pour leur enfant, pour le distraire, le rassurer et diminuer sa perception de la douleur. Évidemment l’angoisse du parent peut majorer celle de l’enfant et même éventuellement sa douleur, du fait de la composante émotionnelle de cette dernière. C’est pourquoi il est important d’informer les enfants et aussi les parents sur les gestes et les soins qui sont effectués. »
Pour les enfants qui souffriraient de douleurs chroniques, dues à une maladie par exemple, le rôle des parents est plus que jamais important. Il existe d’une part des programmes d’éducation thérapeutique pour les familles, lorsque l’enfant doit prendre un traitement en cas de crise douloureuse ou au long cours, lui apprenant à prendre ses médicaments à bon escient. Il est aussi possible de suivre des « thérapies » visant à soulager l’anxiété ou mieux gérer la douleur au quotidien. Des associations comme Sparadrap sont aussi là pour soutenir les familles et apporter des moyens et une assistance.
Comment les aider ?
« Un parent ou un soignant peut favoriser l’effet placebo chez l’enfant. En effet, rassurer un enfant le soulage, c’est même prouvé ! Le cerveau peut contrôler des douleurs modérées. »
Aider son enfant qui traverse un épisode de douleur se fait majoritairement par une action sur la composante émotionnelle. L’un des phénomènes qui se met en place naturellement lorsque l’enfant est rassuré est ce qui peut grossièrement être appelé l’effet placebo (réaction psychophysiologique positive observée bien que le soin donné ne soit pas forcément efficace). Celui-ci est d’autant plus important chez l’enfant quand les parents lui donnent de quoi se soulager et se détendre. Même si ce n’est qu’un sucre, être rassuré par ses parents est essentiel pour l’enfant qui vivra plus sereinement sa douleur. « Un parent ou un soignant peut favoriser l’effet placebo chez l’enfant. En effet, rassurer un enfant le soulage, c’est même prouvé ! Le cerveau peut contrôler des douleurs modérées. »
Quelques conseils
À retrouver sur le site de l’association Sparadrap (www.sparadrap.org)
- Tous les enfants n’expriment pas la douleur de la même manière, il faut surtout repérer les changements de comportement (plaintes, pleurs, appétit, calme inhabituel…)
- Proposer une échelle de cotation de la douleur
- Demander de montrer la zone douloureuse sur un dessin
- Une présence réconfortante limite la sensation douloureuse
- Exprimer sa douleur par n’importe quel moyen n’est pas de la faiblesse, cela fait du bien
- Dédramatiser la situation
- Distraire à tout prix pour faire oublier
- Une compresse chaude ou froide accompagnée de petites frictions sur la zone douloureuse
L’association Sparadrap
Sparadrap est née de la volonté d’aider les enfants à mieux vivre les soins, les examens médicaux et l’hospitalisation. Ses actions s’articulent autour de trois grands axes : l’information et la préparation des enfants et de leur famille, l’utilisation de tous les moyens pour éviter et soulager la douleur, et la valorisation du rôle des proches. Portée par des parents et des professionnels, l’association met à disposition sur son site Internet de nombreuses fiches-conseils pour toute la famille sur l’hospitalisation, les piqûres, les bobos du quotidien, les maladies chroniques, les visites chez le dentiste… Vous y trouverez du contenu pour les enfants et pour les parents.
Ce qu’il se passe dans le corps
Lorsque nous nous coupons, les terminaisons nerveuses se trouvant sur notre peau tirent la sonnette d’alarme et vont envoyer un message au cerveau via les nerfs. Une fois le message arrivé au cerveau, le signal est interprété comme une douleur (dite aiguë dans le cas d’une coupure) et nous en ressentons les effets.
- Il est primordial de s’assurer auprès de son médecin ou de son pharmacien quels types de médicaments et quelles doses conviennent aux enfants.
Par Juliette Dunglas