« Toujours souriante, positive et dynamique, telle était la patiente qui venait au moins une fois par semaine dans mon officine. Atteinte d’un cancer digestif résistant, elle me racontait, semaine après semaine, les petites victoires et les échecs de son parcours de combattante. »
Que sait notre pharmacien de nous ? Et bien… tout et rien en même temps.
Ce professionnel de santé fait partie des veilleurs de notre santé, opérant avec discrétion derrière son comptoir, le pharmacien nous délivre de petites et de grandes choses. À chaque visite, il veille au grain et en un coup d’œil sur notre dossier pharmacie, il sait ce dont nous avons besoin, se rappelle de certains détails, vérifie quand nous sommes venus la dernière fois. Ces informations et sa formation lui permettent alors de nous poser les bonnes questions, d’anticiper les problèmes et de tirer la sonnette d’alarme en cas de pépin.
Il paraîtrait que nous avons trois pharmacies : notre pharmacie préférée, celle où nous nous allons chercher nos traitements, notre pharmacie pratique, celle qui se trouve à côté du boulot, et notre pharmacie pas chère, celle où nous achetons un paquet de 500 cotopads. Finalement, même si nous avons l’impression de ne pas y aller tant que ça, la pharmacie est au cœur de notre vie, que ce soit pour un spray antiseptique, un antihistaminique en urgence ou une boîte de lait en poudre.
« Finalement, même si nous avons l’impression de ne pas y aller tant que ça, la pharmacie est au cœur de notre vie. »
Et les pharmaciens se rappellent toujours de quelque chose qui nous caractérise. Leur rôle est d’être au plus proche de leur patientèle, c’est la vocation de ce métier qui, même si on l’associe bien trop souvent à un épicier des médicaments, est en réalité un métier du soin et du lien. Pour preuve, Lise Berneau, pharmacienne nous parle d’une de ces patientes qui l’a marquée.
« Toujours souriante, positive et dynamique, telle était la patiente qui venait au moins une fois par semaine dans mon officine. Il faut dire qu’avec son cancer, elle devait venir régulièrement chercher ses traitements. Atteinte d’un cancer digestif résistant, elle me racontait, semaine après semaine, les petites victoires et les échecs de son parcours de la combattante. Après des années de lutte, cette maman de trois grands enfants continuait à se battre avec hargne contre le crabe. À chaque visite nous parlions de son suivi, elle me posait des questions sur les effets secondaires de son traitement, me racontait des histoires sur ses enfants.
Avec les patients ayant une maladie chronique ou un cancer, nous passons souvent plus de temps à discuter, car tous les aspects de la vie sont altérés. Nous nous devons de repérer d’éventuels signaux d’alerte, des effets secondaires curieux, ou encore de faire le lien entre telle et telle chose.
Je me souviens d’un épisode très dur de rechute. Elle avait passé 1 mois en chambre stérile, à l’hôpital, car la chimiothérapie avait complétement abattu son immunité. À ce moment-là, son équipe soignante redoutait le pire, et sa famille aussi d’ailleurs qui pensait passer le dernier Noël avec elle. Pourtant, après cela, quand elle venait à la pharmacie, nous remarquions sa combativité et sa positivité infatigables, c’était admirable.
Chaque semaine, je me demandais si j’allais la revoir, si j’allais la voir passer la porte de la pharmacie. Parfois, c’est son mari qui venait chercher son traitement et je ne savais jamais si cela était synonyme de bonne ou de mauvaise nouvelle. Les mois et les semaines passaient et elle était encore là.
Dernière tentative. Les médecins lui ont proposé de lui administrer un traitement novateur, sans certitude pour autant de la réussite de ce dernier, ni de sa survie. Pour cela, elle devait rester 1 mois à l’hôpital, durée nécessaire d’hospitalisation après l’administration de ce traitement, pour s’assurer que tout aille bien. Cela est arrivé juste avant l’été et je suis donc partie en vacances au Japon. Loin de l’officine, je ne pouvais m’empêcher d’avoir une petite pensée pour elle, me demandant si le traitement allait fonctionner et si j’allais la revoir à mon retour. D’ailleurs, lorsque je me rendais dans des temples, j’en profitais pour lui adresser une petite prière.
« Lorsque je me rendais dans des temples, j’en profitais pour lui adresser une petite prière. »
Pour nous, pharmaciens, chaque patient est une histoire. Il y a ceux que nous connaissons mieux, avec qui nous échangeons quelques mots ou bien un simple bonjour, ceux que nous voyons passer de temps en temps, ou ceux que nous ne revoyons plus. Mais quels qu’ils soient, nous nous devons de veiller sur eux. À travers ses ordonnances, la fréquence de ses passages, ses questions, le patient est un livre à demi-ouvert que nous lisons. Là est le rôle du pharmacien d’officine, conseiller et veiller.
Quant à cette patiente, et bien, j’ai eu la joie de la voir franchir de nouveau le seuil de ma pharmacie… »
« Pour nous, pharmacien, chaque patient est une histoire. »
Exposition cancers
Qu’est-ce que le cancer ? Comment se manifeste-t-il ? Comment le soigne-t-on ? Que traversent les malades et leur famille ?
C’est pour explorer ces questions et bien d’autres que la Cité des sciences et de l’industrie (Paris) a monté l’exposition Cancers, en collaboration avec l’Institut national du cancer (INCa) et l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).
Parce que cette maladie s’insinue chaque année dans la vie de près de 400 000 personnes et leur entourage, l’exposition veut s’adresser à toutes et tous, touché(e)s ou non par le crabe. Elle explore ainsi de nombreux sujets, de la naissance des cellules cancéreuses jusqu’à la vie d’après le diagnostic en passant par la prévention. Elle permettra d’en savoir plus sur la prise en charge des patients, les associations de soutien, l’avancée de la recherche, l’évolution de la maladie ou encore le vécu des malades. Entre textes, animations, petits films et images, Cancers est un véritable lieu de médiation et de rencontres entre scientifiques, acteurs de santé, associations, grand public, patients et entourage ; et vise surtout à lever le tabou sur cette maladie, sombre et solitaire. Une exposition plus que réussie dans un lieu qui respecte la dimension intime et émotionnelle des personnes traversant ces épreuves.
Cancers, Cité des sciences et de l’industrie de Paris du 6 septembre 2022 au 8 août 2023. Exposition trilingue (français, anglais, espagnol) et braille à partir de 14 ans.
Propos recueillis par Juliette Dunglas





