Huile d’olive, de tournesol, de colza… Difficile, parfois, d’y voir clair. Quelles utilisations ? Quels effets sur la santé ? Le Dr Jean-Michel Lecerf, médecin nutritionniste à l’Institut Pasteur de Lille, nous aiguille.
Par Sacha Citerne
« Le gras, c’est la vie ! » s’exclame le gourmand Karadoc dans la série télé Kaamelott. Et il n’a pas tort. Les lipides sont, avec les glucides et les protéines, une des trois grandes familles de macronutriments, essentiels pour un bon apport énergétique. Ils jouent autant un rôle de stockage que de structure, notamment des cellules. En consommer est donc indispensable.
Environ 80 grammes par jour, dont 20 à 35 grammes d’huile, qui s’additionnent aux lipides d’autres aliments sont recommandés. « Aucune huile n’est parfaite, explique le Dr Jean-Michel Lecerf, médecin nutritionniste à l’Institut Pasteur de Lille. Il est important de varier les huiles comme les aliments ». La raison de cette diversité nutritionnelle ? La biochimie !
Acides gras, quels oméga ?
La majorité des lipides sont ingérés sous forme d’acides gras. Certains sont saturés, et sont à limiter surtout s’ils proviennent de produits ultratransformés. D’autres acides gras, dits insaturés, sont à privilégier : avec d’un côté les mono-insaturés, dont fait partie l’acide oléique (un oméga-9), et de l’autre les acides gras poly-insaturés, avec les fameux oméga-6 (comme l’acide linoléique) et oméga-3 (comme l’acide α-linolénique).
« Ces oméga-3 et 6 sont des acides gras indispensables, c’est-à-dire qu’il faut les fournir au corps en mangeant », enchérit le nutritionniste, car le corps ne sait pas les fabriquer seul.
« Par notre alimentation, nous consommons assez d’oméga-6, ajoute le Dr Lecerf, en revanche nous ne consommons pas assez d’oméga-3 ». Indispensables, ces acides gras agissent comme des hormones et participent à des fonctions physiologiques aussi fondamentales que la contraction musculaire, la reproduction, la coagulation sanguine, l’inflammation, l’activité neuronale, etc.
La bonne balance
Les oméga-3 se trouvent en bonne quantité dans l’huile de colza, de soja ou encore de lin. L’Agence nationale sécurité sanitaire alimentaire (Anses) recommande une alimentation où le rapport d’oméga-6 sur oméga-3 se rapproche de 5 pour 1. Aujourd’hui, il est plutôt estimé à 15 (voire 20) pour 1 dans les pays occidentaux. En France, il est de 10 pour 1. Avec les huiles, il faut équilibrer. Certaines huiles rares, comme l’argan (très riche en polyphénols) ou la palme rouge (riche en caroténoïdes, des précurseurs de la vitamine A et en vitamine E) sont intéressantes, car elles apportent d’autres molécules d’intérêts que les oméga, mais sont
souvent plus chères.
L’huile sur le feu
Dans la poêle, « l’huile d’olive résiste très bien à la cuisson, contrairement aux idées reçues, démystifie le Dr Lecerf, c’est celle qui résiste le mieux ». Et l’idéal est de l’associer avec d’autres huiles pour couvrir les divers apports (voir encadré). Pour les fritures, l’huile de tournesol est la plus commune. Son « point de fumée » à 227 °C – température à laquelle se dégradent les acides gras – la rend très résistante. Les frites se savourent aussi à la graisse animale, pour un goût plus prononcé. Mais les graisses saturées y sont au rendez-vous. Elles ont tendance à favoriser les dépôts de « mauvais » cholestérol dans les artères et à augmenter les risques de maladies cardiovasculaires. Avec parcimonie donc.
2g : c’est l’apport quotidien conseillé en acides gras essentiels chez l’adulte pour les oméga-3 et, 9 à 13 grammes pour les oméga-6.
– Pour les oméga-3, privilégiez l’huile de lin, de colza ou de noix ;
– Pour les oméga-6, consommez de l’huile de bourrache, de tournesol ou de pépin de raisin.
Quand la graisse agresse
En cas de problèmes de santé, comme un taux élevé en cholestérol sanguin ou des troubles cardiométaboliques (athérosclérose, hypertension, diabète de type 2, obésité…), il n’y a pas réellement d’huile miracle !
Néanmoins, « une alimentation méditerranéenne et un évitement des produits ultratransformés » aide à réduire les risques de complications métaboliques, souligne le Dr Lecerf. Alors avec les graisses comme avec le reste, l’essentiel d’une bonne santé se trouve dans la diversité.
3 huiles à avoir chez soi, selon Jean-Michel Lecerf
Huile de colza : Pour un rapport satisfaisant oméga-6/oméga-3 (environ 2,4 pour 1). Elle peut s’utiliser en salade, mais aussi en cuisson. L’huile de colza est en revanche, à éviter pour la friture.
Huile de noix : Un peu plus riche en oméga-6, mais avec un rapport convenable. De plus, elle est riche en polyphénols, des composés antioxydants naturels. Elle est cependant fragile : sa qualité se dégrade au contact de l’air, de la lumière, de forte température, etc. De ce fait, elle s’utilise plutôt à froid, en assaisonnement.
Huile d’olive : Assez pauvre en oméga 6, encore plus en oméga-3, l’huile d’olive est riche en oméga 9. Par contre, elle contient beaucoup de polyphénols. Elle résiste très bien à la cuisson et se marie avec toute sorte de plats froids ou chauds. À associer avec d’autres huiles pour une bonne couverture nutritionnelle.
Préférez les huiles vierges, extraites à froid et évitez les huiles raffinées. Ces dernières perdent en qualité nutritionnelle par le long traitement industriel subi pour leur obtention.
Pour aller plus loin
40 idées fausses sur les régimes
Dr Jean-Michel Lecerf, éditions Quae





