Si les régimes minceur existent depuis l’Antiquité, Hippocrate énonçait une liste de recommandations pour les personnes en surpoids il y a 2 400 ans, ceux-ci constituent rarement de bonnes pratiques alimentaires.
Régime Dukan, régime cétogène ou régime mono- diète, un groupe de travail de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), présidé par le Dr Jean-Michel Lecerf, alertait il y a 13 ans déjà sur les risques liés aux régimes amaigrissants.
La mono-diète
Ce régime consiste à restreindre son alimentation à un seul aliment, souvent du raisin ou de la pomme, durant plusieurs jours. L’objectif affiché ici est de mettre au « repos » le système digestif pour l’aider à se débarrasser de supposés composés toxiques. Cependant, comme le souligne le Dr Jean-Michel Lecerf, directeur du service nutrition de l’Institut Pasteur de Lille : « le tube digestif n’a pas besoin d‘être mis au repos » et « la notion de détoxification est purement commerciale ». Malgré les nombreux intérêts que peuvent présenter les fruits (fibres, vitamines…), ils sont à consommer de concert et non individuellement, au risque de créer des déséquilibres alimentaires et des déficits nutritionnels.
Prendre du recul sur son alimentation
Le jeûne
Jeûner peut prendre des formes diverses mais consiste généralement à ne consommer que très peu, voire pas du tout, d’aliments. Le but est de faire puiser le corps dans ses réserves pour perdre du poids. Si cela peut s’avérer efficace sur le court terme, la perte de poids ne se maintient pas dans la durée. De plus, jeûner peut aussi pousser le corps à utiliser les réserves maigres (les muscles) pour subvenir à ses besoins énergétiques, ce qui peut se révéler dangereux pour des patients âgés.
Selon notre expert, bien que sans bénéfice durable, un jeûne de 24 à 48 heures est sans danger pour un adulte en bonne santé et permet de prendre conscience d’éventuels excès.
Régime Dukan
Cette méthode est un régime dit hyperprotéiné et hypocalorique. On consomme essentiellement des protéines d’origine animale en restant en dessous de l’apport calorique journalier (environ 2 000 kcal) nécessaire au fonctionnement du corps.
C’est dans son livre publié en 2000 que Pierre Dukan, docteur en médecine désormais radié de l’Ordre des Médecins, énonce les principes d’un régime qui fera le tour des médias. Il comporte quatre phases. La première, la phase d’attaque, consiste à ne consommer que des protéines durant cinq jours pour amorcer la perte de poids. Ensuite vient la phase de croisière où l’on alterne entre des jours de protéines pures et des jours où certains légumes verts sont autorisés. Sont interdits les matières grasses, les féculents ou encore les fruits. Puis l’avant-dernière phase : la phase de consolidation durant laquelle sont réintroduits un fruit par jour, une portion légère de féculents et un produit laitier. Et enfin, la phase de stabilisation : l’alimentation reste restrictive et comporte une journée de protéines pures par semaine. Elle doit durer à vie. Après quatre ans, 80 % des utilisateurs de ce régime déclarent l’avoir abandonné et avoir récupéré le poids perdu. En outre, ce régime pose des problèmes : malgré la présence de quelques légumes, cette diète reste déficitaire en fibres qui sont primordiales pour le bon fonctionnement de la digestion et un lien clair a été établi entre régime hyper protéiné et augmentation du risque de calcul rénal.
La cétose pour faire fondre les graisses
Régimes cétogènes
Les régimes cétogènes – ou keto diet en anglais – se basent sur la voie métabolique qui prend le relais lorsque les réserves de sucre sont épuisées : la lipolyse. En limitant l’apport en glucides (sucre, féculents…), l’organisme consomme ses réserves et lorsque le sucre n’est plus disponible, le corps va utiliser les acides gras présents dans les réserves de graisses pour produire des corps cétoniques. Ceux-ci serviront de source d’énergie au corps, cet état s’appelle la cétose.
Si l’efficacité de ce régime a été démontrée dans la diminution de la fréquence des crises d’épilepsie sévères chez l’enfant ou l’amélioration du contrôle de la glycémie chez des patients diabétiques, un avis et un suivi médical strict sont nécessaires. Quant à la perte de poids, elle est avérée à court terme mais dès l’arrêt du régime le patient observe un rebond pondéral.
« Apprendre à manger avec modération et avec plaisir d’un peu de tout »
Le Dr Jean-Michel Lecerf, directeur du service nutrition de l’Institut Pasteur de Lille, nous apporte son expertise.
Quels problèmes posent ces régimes minceurs ?
Un problème que posent les régimes très restrictifs sont les modifications du comportement alimentaire et de la relation à la nourriture. Non seulement apparaissent des frustrations, mais aussi des phénomènes de compensation et des sensations de manque. Les personnes suivant ces diètes ne savent plus quels sont les repères dans l’alimentation et peuvent perdre les sensations alimentaires normales de la faim et du rassasiement, de sorte qu’au bout d’un certain temps, elles ne savent plus ce qu’elles doivent manger.
« Il manquera toujours un certain nombre de vitamines et de minéraux »
Le régime Dukan, c’est une fausse bonne idée ?
Le principe des régimes hyperprotéinés comme Dukan n’est pas infondé. L’idée est d’essayer de perdre du poids en épargnant la masse musculaire, la masse maigre. Pour cela, on va réduire les calories et on va augmenter les protéines. Mais ces régimes sont déséquilibrés. Comme il faut qu’ils soient hypocaloriques, ils sont très pauvres en aliments glucidiques donc pauvres en fibres. Ils doivent alors être compensés par des apports supplémentaires en fibres mais il manquera toujours un certain nombre de vitamines et de minéraux. Et puis la masse maigre ne sera quand même pas épargnée puisqu’elle va de toute façon diminuer.
Quelles bonnes pratiques alimentaires appliquer ?
Souvent les régimes sont basés sur une dichotomie entre les bons et les mauvais aliments. Ce qu’on prône, c’est plutôt d’apprendre à manger avec modération et avec plaisir d’un peu de tout. Certains aliments, bien sûr, vont poser plus de problèmes que d’autres mais une alimentation bonne pour la santé est une alimentation qui ne va rien interdire mais va modérer davantage certains aliments, en essayant de retrouver une relation positive et apaisée avec l’alimentation. Le prototype du régime équilibré et bon pour la santé c’est le régime méditerranéen. Il a fait l’objet d’énormément d’études qui ne sont jamais contredites.
Ce régime méditerranéen, en quoi est-ce qu’il est si bon et si bien adapté à l’alimentation ?
Déjà, il ne supprime rien. Ensuite, il offre une large place aux aliments simples et natures que sont les fruits, les légumes, les céréales complètes, les légumes secs, les oléagineux et à l’huile d’olive. Il tient compte du terroir et il maintient toujours un peu de produits animaux : un peu de viande, un peu de poisson, des produits laitiers notamment fermentés. C’est un régime un peu frugal qui, dans sa version originelle, correspond un peu au régime crétois des années 1960. Il y a peu d’aliments ultra-transformés, d’aliments sucrés et d’aliments raffinés, ce régime méditerranéen a fait ses preuves.
Par Arthur-Apollinaire Daum





