À la maison, au travail et même dans la rue, les écrans ont envahi nos vies, particulière ment le smartphone. Il peut être à l’origine de nombreux problèmes : cyber-harcèlement, perturbation du rythme circadien ou encore comportements addictifs…
En 2024, impossible de passer une journée sans poser les yeux sur un écran. Que l’on s’en serve pour s’informer, se divertir ou travailler, ils sont devenus incontournables. Au même titre que certaines substances, certains comportements peuvent mener à une addiction, notamment le smartphone qui sert aujourd’hui de cordon social, d’horloge, de réveil, de calendrier, d’appareil photo, de moyen d’accès à l’information…
Une addiction, qu’est-ce que c’est ?
L’évolution a abouti à un système reposant sur le renforcement positif pour nous garder en vie et perpétuer l’espèce. Lorsque l’on boit, que l’on mange, que l’on a un rapport sexuel ou que l’on s’adonne à une activité que l’on aime, le cerveau nous fait ressentir du plaisir, nous poussant à réitérer l’expérience qui devient avec le temps une habitude. C’est un mécanisme de renforcement positif.
Cependant, cette recherche du plaisir peut se révéler être une quête sans fin aux effets néfastes. Que se passerait-il si l’on se consacrait entièrement à une seule activité, au détriment de toutes les autres ? Probablement rien de bon. Pour pallier cette éventualité, il existe une « tour de contrôle » qui nous permet de réguler nos pulsions de recherche de plaisir, selon nos valeurs, nos idéaux, nos dogmes ou notre morale.
Au sein de notre cerveau se joue donc une bataille constante entre la recherche du plaisir et le contrôle de ces pulsions. Lorsque cet équilibre est brisé en faveur des pulsions de recherche du plaisir, on parle d’addiction. Dans son livre « Docteur : addict ou pas ? », le professeur Laurent Karila, psychiatre et addictologue, définit l’addiction dans ces termes : « la perte de la liberté de s’abstenir, une altération de la prise de décision et de la liberté de s’abstenir ».
Une addiction a son smartphone ?
Si on ne parle pas à proprement parler d’addiction à son smartphone, mais plutôt de « comportements addictifs » : on ne peut plus s’en passer, on l’emmène partout et on le consulte en permanence, jusque dans les toilettes !
Quand en être séparé crée une angoisse de séparation et d’abandon, on parle de nomophobie (no mobile phobia) ou mobidépendance, sous sa forme francisée.
Prendre de la distance avec son smartphone
Appliquer quelques conseils simples peut aider à reprendre le contrôle ou simplement à mieux gérer son rapport à son smartphone, souvent aussi pratique qu’incontournable.
→ Supprimer les alertes de notifications comme les sonneries, les vibrations ou les flashs lumineux.
→ Éteindre ou mettre son smartphone en mode avion avant de se coucher.
→ S’interdire d’utiliser son smartphone au moins 1 heure avant le coucher, surtout pour les plus jeunes.
→ Ne pas se précipiter sur son smartphone durant une insomnie.
→ Ne pas utiliser son smartphone dès le réveil, comme pour le coucher attendre au moins une heure.
→ Ne pas déposer son smartphone sur la table lorsque vous vous asseyez quelque part.
→ Pour les parents : ne pas donner le smartphone à l’enfant lors de déjeuners ou sorties (nounou digitale), interdire le smartphone dans la chambre des enfants ou adolescents et montrer l’exemple.
→ Ne pas considérer le smartphone comme un refuge lorsque vous vous ennuyez ou êtes déprimé. Sortir voir du monde est beaucoup plus sain !
D’une manière plus générale, comme pour tout comportement addictif, le professeur Karila souligne dans son livre qu’il est important de prendre en considération les raisons qui peuvent pousser à utiliser son smartphone. Qu’est-ce vous faites dessus ? Quels contenus y consommez-vous ? Qu’est-ce que ces contenus vous font ressentir ?
Une fois ces questions posées, il est nécessaire d’identifier les déclencheurs qui poussent à cet usage compulsif du smartphone. Et de repérer les problèmes sous-jacents dont le comportement compulsif ne sera que le symptôme. Les déclencheurs peuvent être la solitude, l’ennui, le stress, l’anxiété, la tristesse, la dépression…
Modifier ses habitudes et comportements peut prendre du temps. Une évolution progressive en se fixant petit à petit de nouveaux objectifs a plus de chances de se pérenniser dans le temps.
Si l’usage de votre smartphone est trop envahissant socialement pour vous, consultez un professionnel en addictologie ou en psychologie.
Quel rapport avez-vous avec votre smartphone ?
L’Observatoire santé Pro BTP a publié le 23 janvier 2024 une étude sur l’addiction aux écrans. 21 422 adhérents de Pro BTP Groupe ont répondu au questionnaire. 71 % déclaraient qu’ils ne pourraient pas se passer de leur smartphone. 64 % estimaient qu’ils passaient régulièrement du temps sur leur smartphone sans réfléchir alors qu’ils pourraient faire autre chose de plus important.
72 % des moins de 40 ans consultent leur smartphone dès le réveil et 79 % vont souvent ou toujours aux toilettes avec lui.
Êtes-vous nomophobe ?
Répondez par « oui » ou « non » aux questions ci-dessous
- Êtes-vous inquiet, angoissé, paniqué si vous êtes sans votre smartphone ou si vous l’avez oublié en partant de chez vous le matin ?
- Êtes-vous inquiet, angoissé, paniqué si vous voyez votre smartphone se décharger sans ne pouvoir rien faire ?
- Êtes-vous inquiet, angoissé, paniqué si vous n’avez aucun réseau ?
- Est-ce que la première chose que vous faites en arrivant quelque part est de trouver une prise pour éventuellement charger votre smartphone et/ou avoir du wifi ?
- Est-ce que, quand on vous demande votre chargeur, vous hésitez à le donner par peur de ne plus le revoir ?
- Êtes-vous inquiet, angoissé, paniqué si vous entendez votre smartphone sonner ou vibrer et vous ne pouvez pas répondre ?
- Est-ce que votre smartphone est comme votre clé USB mentale : toute votre vie est dedans ?
- Est-ce qu’un dysfonctionnement de votre smartphone vous inquiète comme si votre enfant, votre ado ou un proche était malade ?
- Est-ce que vous ne pouvez pas/plus dormir ou dormez moins bien sans votre smartphone près de chez vous ou contre vous ?
- Êtes-vous inquiet si l’écran est cassé et hésitez-vous à aller le faire réparer par crainte d’être séparé de lui quelques heures, voire quelques jours ?
→ Une majorité de « oui » indique que la nomophobie vous guette.
(D’après Docteur : addict ou pas ?, Pr Laurent Karila, psychiatre et addictologue)
Docteur : addict ou pas ?
du Pr Laurent Karila, psychiatre et addictologue, est disponible aux éditions Harper Collins.
- 80 % des conducteurs utilisent leur smartphone au volant – Selon le baromètre 2023 Axa Prévention
- 72 % des moins de 40 ans consultent leur smartphone dès le réveil
- 79% vont souvent ou toujours aux toilettes avec leur smartphone
Par Arthur-Apollinaire Daum





