L’accouchement par césarienne est méconnu et souvent redouté par les futurs parents en raison de nombreuses idées reçues. On fait le point grâce aux commentaires du Dr Thierry Harvey.
La césarienne est obligatoire en cas de bébé en siège
C’est faux ! C’est plus fréquent mais pas systématique, comme nous l’explique le Dr Harvey : « Lorsqu’un bébé se présente en siège, nous devons évaluer la possibilité d’un accouchement par voie basse. Pour cela, nous nous référons aux recommandations du Collège français de gynécologie émises en 2020. D’abord, il est préconisé de pratiquer une version (par des manœuvres manuelles effectuées sur le ventre, on essaie de retourner le bébé). En cas d’échec, on fait une évaluation bénéfice/ risque d’un accouchement par voie basse avec notamment le consentement de la future maman, un scanner ou une IRM du bassin et enfin une évaluation du poids fœtal. Avec ces éléments, on peut déterminer si l’accouchement peut être tenté par voie basse ou non. Idéalement, l’accouchement par voie basse doit alors avoir lieu avec un obstétricien senior sur place. Il y a, en revanche, une indication de péridurale systématique car on estime entre 40 et 50 % de césarienne mais encore une fois : “à bonne dilatation, bon siège”, dit un vieux dicton… Et quand les éléments indiquent qu’une césarienne est préférable, elle est programmée à 39 semaines de grossesse. »
Je ne vais rien sentir avec l’anesthésie
C’est faux ! La femme qui accouche par césarienne est bien entendu anesthésiée, mais cela ne signifie pas qu’elle ne va rien sentir : « L’intérêt de l’anesthésie est de ne pas avoir mal, mais pas de ne rien sentir. Elle peut sentir qu’on fait des “trucs” dans son ventre. L’anesthésie sert donc uniquement pour la douleur. Et lorsque la rachianesthésie ne fonctionne pas correctement, ce qui arrive, on a alors recours à l’anesthésie générale pour s’assurer que la femme ne souffre pas. »
Une césarienne signifie : plus d’accouchement possible par voie basse après
C’est faux. C’était un dogme des années 1980 qui n’a plus lieu d’être. « Il faut savoir pour quelle raison il y a eu la première césarienne. Quand la césarienne est arrivée après un long travail, souvent la femme préfère directement envisager la césarienne… Mais si c’était le monitoring fœtal inquiétant ou un non-engagement à dilatation complète qui a motivé la césarienne, on ne l’envisagera pas automatiquement pour un second accouchement. En revanche il faut savoir que lorsque la voie basse est envisagée, il y a 50 % de risque que ça se termine en césarienne. »
À cause de la césarienne, pas de peau-à-peau et il faut attendre plusieurs heures avant de voir son bébé
C’est faux. Les blocs opératoires sont souvent froids, donc on évite à ce moment-là de laisser le bébé, nu, dans le froid, mais il est possible ensuite d’en profiter rapidement. « Si le bébé ne nécessite pas de soins de réanimation, on le présente toujours à sa maman le temps de quelques câlins. Mais comme on ne veut pas rester dans le froid en sortant du bain, on préfère souvent aller sécher le bébé, proposer le peau-à-peau au coparent, en attendant que la maman sorte du bloc une fois recousue (environ 15 minutes). En salle de réveil, quand le bébé va bien, on le met contre sa maman : il n’y a pas meilleur chauffage que la peau de la maman. »
Pas de rééducation du périnée après une césarienne
Ça dépend. L’état post-partum du périnée dépend de chaque femme et de chaque grossesse. « La prescription de rééducation périnéale n’est pas systématique. Elle doit être évaluée lors de la consultation postnatale (vers 6 semaines après l’accouchement). Toutes les femmes n’en ont pas besoin. Ça dépend du motif de la césarienne et de la continence urinaire. Le rendez-vous postnatal permet de faire ce bilan et de prescrire ou non les séances de rééducation. »
La césarienne, ce n’est pas un vrai accouchement
C’est faux ! Il existe deux types d’accouchements : l’accouchement par voie basse et l’accouchement par césarienne. Mais dans les deux cas, il s’agit de la mise au monde de l’enfant. « De plus en plus d’obstétriciens demandent aux femmes, pendant la césarienne, de pousser pour aider à faire sortir l’enfant, comme lors d’un accouchement par voie basse. D’ailleurs, comme la cicatrice est juste au-dessus du pubis, j’aime dire aux femmes qu’elles ont accouché non pas par les voies naturelles mais par les voies surnaturelles… »
La cicatrisation est longue et douloureuse
C’est parfois vrai. La cicatrisation de la peau a lieu en 7 jours. Mais pour les couches inférieures du ventre, la cicatrisation peut prendre plus de temps. « Il y a 3 plans de cicatrisation à prévoir : celui de la peau, de l’aponévrose et de l’utérus. Il y a d’abord une douleur “normale” liée à la chirurgie, prise en charge par des antalgiques. Puis, dans un second temps, souvent 1 mois après la césarienne, le fil de l’aponévrose commence à se résorber et ça peut être douloureux, comme une brûlure. C’est pourquoi certaines femmes ont un retour des douleurs après 1 mois. »
Je ne peux pas allaiter après une césarienne
C’est faux. Contrairement aux croyances, la césarienne ne retarde pas la montée de lait. « Déjà, il faut commencer par dire qu’allaiter, c’est donner du lait. Donc toutes les femmes allaitent, avec un sein ou un biberon. Techniquement, les douleurs au ventre peuvent rendre l’allaitement au sein plus difficile. Il y a des médicaments antidouleur qu’on donne dans les premiers jours et qu’on ne donnera pas ensuite car ils peuvent passer dans le lait. »
On doit rester allongée longtemps après une césarienne
Ça dépend de ce qu’on appelle long ! La césarienne est une intervention qui nécessite un temps de surveillance, puis un temps pour retrouver la motricité de ses jambes à cause de l’anesthésie. « Les femmes restent 2 heures en salle de surveillance postinterventionnelle. Comme pour n’importe quelle chirurgie, il est difficile de se lever. Et comme il s’agit d’une anesthésie locorégionale, il faut attendre de retrouver la motricité des jambes, ce qui peut prendre 4 à 6 heures selon les femmes. »
Par Gaëlle Monfort, avec la collaboration du Dr Thierry Harvey, chef de service de la maternité du groupe hospitalier des Diaconesses-Croix-Saint-Simon à Paris.