Rendre la vue à une personne aveugle ou malvoyante, c’est le rêve de tout médecin ophtalmologue. Depuis une dizaine d’années, il est en passe de devenir réalité, grâce aux implants rétiniens.
Une technologie qui progresse rapidement, redonnant espoir à toute une catégorie de patients atteinte de pathologies ophtalmologiques graves, héréditaires comme la rétinopathie pigmentaire, ou du vieillissement, comme la dégénérescence maculaire liée à l’âge. “La DMLA concerne un million et demi de personnes en France, parmi lesquelles 10 % sont aveugles ou très malvoyantes. Trouver une solution thérapeutique pour ces patients est donc un enjeu majeur,” souligne le Dr Serge Picaud, directeur de recherche Inserm à l’Institut de la vision.
Ces maladies entraînent la perte de la vue du fait de la dégénérescence des cellules photoréceptrices qui composent la rétine, et dont la fonction est de transformer les signaux lumineux captés par l’œil en signaux électriques envoyés jusqu’au cerveau. Jusqu’à présent, les options de traitement étaient inexistantes pour ces patients.
Redonner une autonomie
Pensés pour se substituer aux cellules photoréceptrices, les implants rétiniens sont pour la plupart composés d’électrodes, et se fixent sous la rétine, ou juste à sa surface. Depuis le début des années 2010, de nombreux essais cliniques ont eu lieu pour tester différents dispositifs. Trois d’entre eux ont déjà obtenu une autorisation de mise sur le marché par les autorités européennes. Il s’agit de l’implant Argus II (du groupe américain Second Sight), de Alpha AMS (de l’allemand Retina Implant AG), et de IRIS II (de Pixium Vision en France).
Si les résultats sont prometteurs, ces dispositifs ne permettent pas encore de redonner une vision parfaite aux patients. “Avec ces implants, la vue des patients reste encore très limitée. En continuant à développer de nouveaux implants, notre objectif est de redonner suffisamment d’acuité visuelle pour que les patients puissent lire des textes, se déplacer de manière autonome et reconnaître les visages”, explique Picaud.
Traiter aussi la DMLA
En France, 36 et 40 patients pourront respectivement bénéficier des implants Argus II et Alpha AMS grâce à un dispositif de financement mis en place par le ministère de la Santé, le “forfait innovation”.
Tous sont atteints de rétinopathie pigmentaire, ces implants n’étant pas recommandés pour les patients atteints de DMLA. “Les implants autorisés sur le marché le sont uniquement pour les patients atteints de pathologies héréditaires, car les patients atteints de DMLA ont encore une vision périphérique. Or la résolution retrouvée est actuellement inférieure à celle de cette vision résiduelle et il ne faudrait pas la mettre en danger,” précise Picaud.
Les choses pourraient néanmoins évoluer rapidement dans les prochaines années. Un essai clinique sur cinq patients atteints de DMLA, mené par le Pr José-Alain Sahel à Paris, est en cours. Il s’agit du premier essai au monde de ce type, qui vise à tester l’implant PRIMA de la société française Pixium Vision. Ce dispositif “nouvelle génération” se présente sous la forme d’une simple “pastille” de silicium glissée sous la rétine, et activée avec un faisceau infrarouge. Les premiers résultats indiquent que la plupart des patients implantés peuvent déjà lire des lettres.
La prochaine étape permettra donc de restaurer une acuité visuelle supérieure au seuil de cécité légale de 1/20e défini par l’OMS. Avec, peut-être dans un futur plus lointain, l’objectif de rendre un jour la vue à l’ensemble des patients.
- En France, environ un million et demi de personnes sont atteintes de DMLA. Il s’agit de la première cause de handicap visuel chez les personnes de plus de 50 ans. La maladie touche même jusqu’à 30 % des plus de 75 ans.
Par Léa Surugue