Élue personnalité de l’année 2019 par le magazine Time, Greta Thunberg a résolument marqué la fin de cette décennie suite à ses nombreux engagements pour la planète. Selon elle, elle tiendrait parfois sa détermination de son « superpouvoir » : l’autisme.
Du haut de ses 17 ans, Greta Thunberg est devenue la parte-parole des mouvements écologistes. Voyageant à travers le monde pour rappeler aux politiciens l’état d’urgence dans lequel se situe la planète, Greta attire cependant les foudres de ses détracteurs. Certains n’hésitent pas à attaquer personnellement la jeune fille sur ses différences. La jeune fille garde, malgré tout, la tête haute.
Toutes les couleurs du spectre
« Fière d’appartenir au spectre ! », c’est ce que déclarait Greta Thunberg, le 2 avril 2019, à l’occasion de la journée internationale de l’autisme. Aujourd’hui, il est en effet plus approprié d’utiliser l’expression Troubles du Spectre de l’Autisme (TSA), car il existe tout un prisme d’expression de ces troubles neuro-développementaux. Par exemple, Greta Thunberg se définit comme autiste Asperger, un terme désuet dans le domaine médical, mais qui englobe des formes légères d’autisme, parfois diagnostiquées tardivement. À l’inverse, d’autres autistes sont beaucoup plus affectés et nécessitent un accompagnement au quotidien. Toutes les formes d’autisme partagent néanmoins plusieurs caractéristiques :
- des difficultés lors des interactions sociales, incluant notamment un trouble de la communication ;
- des intérêts restreints, répétitifs et stéréotypés ;
- des troubles neuro-sensoriels comme une forte sensibilité au bruit ou au son.
Dr Éric Lemonnier, pédopsychiatre français reconnu pour sa lutte en faveur de l’inclusion des enfants autistes, rajoute à sa définition d’autisme la notion de durée. « Pour qu’un diagnostic soit clairement établi, il est nécessaire que les troubles soient observés suffisamment longtemps », précise-t-il.
« En France, la prévalence de l’autisme se situerait autour de 1,5 %. » Dr Éric Lemonnier
L’autisme au féminin
D’après les statistiques actuelles, il y a quatre fois plus d’hommes autistes diagnostiqués que de femmes. Greta ferait-elle alors partie d’une minorité ? En réalité, ces chiffres masqueraient une réalité plus complexe, où les femmes autistes sont parfois difficiles à diagnostiquer. Les troubles de l’autisme relevant d’un spectre, il existe une forte hétérogénéité dans l’expression de ce trouble. En particulier, certaines personnes autistes ont de grandes capacités à imiter les comportements allistes (comprendre ici personne non autiste) et se fondent ainsi plus rapidement dans la société. D’après le Dr Lemonnier, l’éducation que l’on donne aux jeunes filles les place dans un environnement où elles sont amenées à développer rapidement ces capacités d’adaptation. Cette hypothèse est partagée par la plupart des spécialistes de l’autisme, mais n’a pas encore été validée par des études scientifiques.
Ces personnes autistes s’intègrent plus facilement dans la société, mais elles partagent néanmoins des caractéristiques communes parfois peu connues.
Les intérêts spécifiques, quésaco ?
Les individus autistes ont un point commun : ils développent des intérêts spécifiques, également appelés intérêts restreints. Comme l’explique Allistair Houdayer sur sa chaîne YouTube H Paradoxæ, ce sont des sujets qui passionnent les personnes autistes de tout âge. Ces intérêts varient au cours de la vie et se manifestent souvent par une volonté intense d’en apprendre plus sur un sujet précis. Ils reflètent en quelque sorte une façon d’appréhender le monde, avec un enthousiasme parfois très poussé et très rapide. Allistair, lui-même autiste, explique qu’au-delà des passions, il a un rapport passionnel aux choses. Pour faire comprendre cette nuance, il explique que, plus jeune, lorsqu’il aimait un groupe de musique, cela s’accompagnait toujours pas un processus intense de recherche sur les membres et d’apprendre les musiques par cœur. Dans cette idée, le Dr Lemonnier ajoute que « multiplier les intérêts spécifiques est aussi un moyen pour développer la curiosité des enfants autistes » ; il est donc bon de ne pas les refréner dans leurs passions.
Et pour Greta ?
Greta Thunberg aurait alors un intérêt spécifique pour le climat qui expliquerait son engagement militant poussé. C’est de là qu’elle tirerait son « superpouvoir », sa capacité à penser différemment et à se donner corps et âme, malgré son jeune âge, pour cette cause qui lui tient à cœur. Elle a notamment déclaré qu’elle pouvait ainsi passer des heures et des heures à s’informer à ce sujet, tout en restant attentive et concentrée.
Au final, c’est sa différence qui amènerait Greta à s’engager à ce point pour la planète et à réveiller les consciences politiques.
Des causes complexes
Les troubles du spectre de l’autisme résultent de l’expression de processus développementaux et plusieurs causes mèneraient à un diagnostic similaire. Tout d’abord, il y a des causes génétiques. En effet, certaines formes d’autisme se transmettent au sein de la même famille. Par exemple la petite sœur de Greta, Beata Thunberg, est également autiste. D’autre part, des études démontrent que l’autisme peut être expliqué par des facteurs autres tels qu’une naissance prématurée ou la prise de Dépakine pendant la grossesse (médicament anti-épileptique). Finalement, tous ces effets peuvent se combiner, ce qui expliquerait en partie pourquoi certaines formes d’autisme sont plus handicapantes que d’autres.
Par Baptiste Gaborieau