Comment se manifeste le zona ? Comment le traiter ? Le Dr Agnès Ehlinger, dermatologue à Thionville, a répondu aux questions de Vocation Santé.
Vocation Santé : comment le zona se développe-t-il ?
Agnès Ehlinger : Le zona est dû au virus varicellezona (VZV) : varicella-zoster virus). Lors de l’enfance le plus souvent, son contact déclenche la varicelle, maladie infectieuse bénigne et très contagieuse (le risque d’en être atteint est de 95 %). Mais, des années plus tard, à la suite d’une réactivation du virus, la personne peut déclencher un zona, dû à une baisse de ses défenses immunitaires (maladies infectieuses, cancer, virus du sida) ou à une fatigue.
Qu’est-ce que le zona ?
AE : Le zona est une maladie infectieuse, et plus précisément une ganglioradiculite : le virus séjourne dans les neurones des ganglions sensitifs à l’état endormi. Une fois réactivé, le virus suit un trajet nerveux. Par exemple au niveau dorsal, les éruptions partent du rachis, suivent un arc de cercle sous forme de bandes (le trajet des nerfs), pour rejoindre l’abdomen : c’est le zona intercostal.
Comment le zona se manifeste-t-il ?
AE : La forme classique est une éruption cutanée au niveau d’un seul flanc (atteinte unilatérale) avec des lésions groupées en bouquets. Les formes mineures se manifestent par deux ou trois bouquets ; pour les formes majeures, toute la bande sera touchée. Durant 3 ou 4 jours, avant que l’éruption cutanée n’apparaisse, des douleurs et des sensations de brûlure se manifestent sur un seul côté du thorax, accompagnées d’un syndrome infectieux (fièvre, fatigue) et d’un gonflement d’un ou de plusieurs ganglions devenant alors douloureux sous l’aisselle (adénopathie axillaire). Puis, des plaques rouges se couvrant de vésicules se forment, groupées en bouquets. Au bout d’une semaine environ, les vésicules sèchent et des croûtes apparaissent.
Est-ce très contagieux ?
AE : Durant les premiers jours par contact direct avec les vésicules, le risque de transmission est très élevé. Si le sujet n’a pas encore eu la varicelle, il l’aura, et non le zona. Cependant, si le sujet l’a déjà eue, dans certains cas, le fait d’être en contact avec le virus pourrait le réactiver, et donc engendrer un zona.
Quel est le traitement ?
AE : Avant 50 ans, si le zona est non ophtalmique, il faut appliquer une pommade cicatrisante ou un antiseptique local (afin d’éviter la surinfection bactérienne). Chez les plus de 50 ans, le traitement doit être le plus rapide possible, idéalement dans les 72 heures, même s’il est seulement suspecté, avec du valaciclovir ou de l’aciclovir, un traitement antiviral (posologie : 1 gramme, 3 fois par jour, pendant 7 jours).
Une fois le patient guéri, des pigmentations post-inflammatoires peuvent persister, qui régressent spontanément dans la majorité des cas au bout de 6 mois. La prise en charge dermatologique est exceptionnelle, et consistera en des séances de laser ou de peeling (éliminer une fine couche de la peau pour stimuler sa régénération) chez un dermatologue.
« On ne peut pas développer un zona sans avoir eu la varicelle. » Dr Agnès Ehlinger
Les douleurs sont‑elles fortes ?
AE : Si la personne est atteinte de douleurs post-zostériennes (complication chronique du zona), oui. Ces douleurs neurologiques peuvent durer de 2 à 4 semaines, et même se prolonger plusieurs années pour certains cas. Leur fréquence augmente de façon significative avec l’âge, en particulier après 50 ans.
Comment les soulager ?
AE : Si les douleurs sont modérées, les patients prennent des antalgiques classiques (paracétamol), associés ou non à de la codéine (antidouleur plus puissant). Si les souffrances sont vraiment fortes ou persistantes, il faut alors prendre des neuroleptiques (carbamazépine), efficaces pour soulager les douleurs neurologiques.
Quid des vaccins ?
- Contre la varicelle : ce vaccin est disponible depuis 2004 (Varilrix®, Varivax®). Contrairement aux États- Unis où la vaccination est recommandée à tous les enfants, en France, seules les indications suivantes préconisent une vaccination contre la varicelle :
– personnes de plus de 18 ans n’ayant pas eu la varicelle et ayant été en contact avec un sujet atteint : injection à réaliser dans les 3 jours suivant le contact ;
– étudiants en santé n’ayant pas eu la varicelle (sérologie à vérifier préalablement) ;
– personnel travaillant dans le secteur de la petite enfance (crèche, maternelle) ;
– les patients en attente d’une greffe d’organe ;
– contre-indications : grossesse, sujets immunodéprimés.
« Il n’est pas recommandé chez les sujets âgés, car il ne sert qu’à se prémunir de la varicelle. Il y aurait une immunité non durable dans le temps et, à l’âge adulte, il existe un risque de développer des varicelles plus graves, car des atteintes pulmonaires peuvent apparaître, explique Agnès Ehlinger. Il faudrait rediscuter des campagnes de vaccination contre la varicelle en France. » - Contre le zona : actuellement, il n’existe qu’un seul vaccin contre le zona : le Zostavax®. Il est utilisé dans la prévention du zona et des douleurs post-zostériennes chez les sujets de plus de 50 ans.
Et les enfants ?
Le zona n’est pas exceptionnel chez les enfants, excepté chez les tout-petits. Au moment de l’adolescence, le stress, une baisse des défenses immunitaires peuvent faire réémerger le virus et entraîner un zona. Les douleurs disparaissent en 2 à 4 semaines.
Quand les yeux sont atteints
Le zona ophtalmique est rare, mais peut être grave : c’est une urgence médicale. Les manifestations douloureuses sont les mêmes que pour un zona classique, mais sont localisées au niveau de la tempe et du front. Au bout de quelques jours, l’éruption apparaît sur différentes parties du visage selon l’atteinte nerveuse : front, paupières, oeil, nez. La prise en charge doit être mise en place le plus rapidement possible, car le virus peut donner une atteinte cornéenne et engendrer des kératites (une inflammation de la cornée entraînant une baisse de l’acuité visuelle et une gêne à la lumière). « L’engagement de l’oeil est en jeu. Le risque est la cécité », indique Agnès Ehlinger.
Quel que soit l’âge, le traitement est antiviral : valaciclovir ou aciclovir à débuter dans les 72 premières heures, à la dose de 1 gramme 3 fois par jour pendant 7 jours.
- 2 à 4 semaines : les douleurs durent de 2 à 4 semaines, mais peuvent se prolonger jusqu’à 2 ans
- 20 % : le zona ophtalmique représente 20 % de tous les zonas
Par Léna Pedon