La quantité est la première notion qui vient à l’esprit lorsqu’il est question de matières grasses. Pourtant, la qualité des graisses consommées a aussi son importance, et celles qui sont riches en acides gras insaturés sont à favoriser.
Ennemies jurées des régimes minceur, les matières grasses jouissent d’une réputation peu flatteuse, souvent assimilées aux problèmes cardiaques ou à la prise de poids. Pourtant, elles sont un constituant essentiel de notre alimentation, et doivent représenter entre 35 et 40 % de l’apport énergétique ingéré chaque jour d’après l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses). Et parmi ces matières grasses, celles qui sont dites insaturées, c’est-à-dire riches en omégas 3, 6 et 9, sont à prioriser. Ces acides gras, qualifiés de « bon gras », sont régulièrement mis en avant pour leurs allégations de santé, notamment sur le plan cardiovasculaire. Mais, même au sein de ces bonnes graisses, l’équilibre est de mise et les apports doivent être harmonisés.
Bon gras et mauvais gras
À la différence du cholestérol, qualifié de bon ou mauvais en fonction de la protéine qui le transporte, les bonnes et mauvaises graisses se distinguent par la structure chimique de leur unité de base : les acides gras. Ainsi, les matières grasses bénéfiques sont celles dont les acides gras sont insaturés, c’est-à-dire qui contiennent une ou plusieurs doubles liaisons entre leurs atomes de carbone. Au sein de cette catégorie sont retrouvés les acides gras oméga-9, dits monoinsaturés, car ils ne comportent qu’une seule double liaison, et les acides gras oméga-3 et oméga- 6, qui, eux, en possèdent plusieurs et sont donc dits polyinsaturés. Ces derniers sont également qualifiés d’acides gras essentiels, car bien qu’ils soient nécessaires à notre métabolisme, ils sont naturellement absents chez l’Homme. Ils doivent donc être obligatoirement apportés par l’alimentation.
Oméga-3, une multitude de bienfaits
Très largement mis en avant ces dernières années, les oméga-3 sont les plus célèbres des acides gras insaturés. Et pour cause, leurs bénéfices sont multiples. Dans le domaine cardiovasculaire tout d’abord, leur consommation est associée à une diminution de la pression artérielle chez les personnes qui souffrent d’hypertension ainsi qu’à une diminution de la quantité de triglycérides dans le sang. Des données récentes ont également suggéré qu’ils avaient un effet positif sur le maintien de la santé mentale dans la dépression, de même que dans certaines démences, dont la maladie d’Alzheimer. Ces résultats doivent cependant être approfondis. Enfin, les oméga-3 sont nécessaires au développement et au fonctionnement du cerveau, du système nerveux et de la rétine. Ils sont notamment impliqués dans la prévention de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA). Leur apport en quantité suffisante est donc primordial chez la femme en âge de procréer, enceinte ou allaitante ainsi que chez l’enfant. Malheureusement, la plupart des études de nutrition mettent en avant leur trop faible consommation, ce qui profite aux oméga-6 et crée une carence.
Où les trouver ?
- Dans les poissons gras : maquereau, sardine, roussette, saumon, espadon, hareng, lompe. Une ou deux portions sont recommandées par semaine pour subvenir aux besoins.
- Dans les graines de certaines plantes ou oléagineux : lin, noix, chia ainsi que dans leurs huiles dérivées. Les légumes verts à feuille comme la mâche, les épinards ou la laitue en sont également riches.
Les oméga-6, essentiels mais trop consommés
Les oméga-6 sont également des acides gras essentiels à l’organisme. Ils interviennent dans un grand nombre de fonctions importantes comme la reproduction, les défenses immunitaires et ont aussi un rôle dans le bon fonctionnement du système nerveux. En outre, plusieurs études ont démontré qu’ils avaient également un effet positif sur les taux de lipides sanguins. Seul bémol : ils sont retrouvés dans de nombreuses sources alimentaires, et sont, de fait, consommés en trop grandes quantités. Or, cet excès perturbe la bonne assimilation des oméga-3, car les deux familles d’acides gras utilisent la même voie de métabolisation et se retrouvent en concurrence dans l’organisme. Une concurrence qui n’a rien d’équitable puisque les enzymes impliquées dans cette métabolisation ont une affinité préférentielle pour les oméga-6. C’est pourquoi un apport trop important en oméga-6 va accentuer la carence en oméga-3. Ainsi, dans le cadre de la réévaluation des Apports nutritionnels conseillés pour les acides gras en 2010, l’Anses recommande, pour une alimentation équilibrée, de maintenir un ratio oméga-6/oméga-3 inférieur à 5. Pour y contribuer, des agriculteurs ont introduit des sources d’oméga-3 dans la ration de certains animaux d’élevage.
Où les trouver ?
- Dans des huiles végétales : de tournesol, de maïs, de soja, d’arachide, ainsi que dans la margarine.
- Dans des produits d’origine animale : viandes de poulet, porc, mouton et bœuf, dans les œufs, dans le lait.
- Dans des produits transformés : biscuits d’apéritif, sauces industrielles, céréales pour le petit déjeuner.
Les oméga-9, bons pour le cholestérol ?
À la différence des oméga-3 et des oméga-6, les oméga-9 ne sont pas des acides gras essentiels et peuvent être fabriqués par l’organisme à partir des graisses saturées. Ils sont néanmoins considérés comme bénéfiques pour la santé, avec un effet protecteur sur le système cardiovasculaire. Plusieurs travaux ont effectivement suggéré que la prise d’oméga-9 aurait un effet négatif sur le taux de mauvais cholestérol et positif sur celui de bon cholestérol. Cependant, la plupart de ces études ont été effectuées sur l’huile d’olive, et les experts soupçonnent que les bénéfices observés soient en réalité dus à la forte teneur en antioxydants de cette dernière.
Où les trouver ?
Dans des huiles végétales : noisette, olive, colza ainsi que dans certaines graisses animales comme la graisse d’oie.
Quelques précautions à prendre
Certaines situations physiologiques ou pathologiques peuvent nécessiter une supplémentation en acides gras insaturés. Bien qu’elles soient considérées comme bénéfiques pour la santé, une consommation excédante en graisses insaturées doit se faire sous contrôle médical, particulièrement chez les femmes enceintes, qui allaitent et chez les enfants. De plus, en raison de leur effet fluidifiant sur la circulation sanguine, une trop grande consommation d’acides gras insaturés est déconseillée chez les personnes qui prennent des médicaments anticoagulants ou qui vont subir une intervention chirurgicale. Enfin, il convient de ne pas omettre que les graisses insaturées sont très caloriques. Une activité physique adaptée à la consommation est donc toujours recommandée.
Un label pour rééquilibrer son ratio
Diminuer le ratio oméga-6/oméga-3, c’est l’un des objectifs de l’association Bleu-Blanc- Cœur et de son label homonyme. Et pour y parvenir, les agriculteurs de cette filière ont incorporé des matières premières riches en oméga-3, tels que le lin ou la luzerne, dans la ration alimentaire de leurs animaux de rente. Résultat : viandes, œufs, lait… les produits d’origine animale issus de cette filière sont plus riches en oméga-3. Une démarche qui tient également compte de la biodiversité et du bien-être animal, et qui est reconnue d’intérêt nutritionnel et environnemental par l’État.
Graisses saturées : ne pas les éliminer
La bonne santé passe par une grande diversité alimentaire, y compris dans le choix des matières grasses. Ainsi, bien que leurs effets sur la santé soient controversés, les graisses saturées ne doivent pas être exclues totalement de l’alimentation. Fromages, viandes grasses, charcuteries… consommés occasionnellement et avec modération, ces aliments ont leur place dans l’équilibre alimentaire. Les produits frais sont par contre nettement à favoriser, au contraire de ceux issus d’un procédé industriel, très néfastes.
L’apport quotidien en acides gras devrait se composer de 50 % d’oméga-9, 20 % d’oméga-6, 5 % d’oméga-3 et de 25 % d’acides gras saturés (source : Vidal)
Julien Dabjat