Des chercheurs israéliens travaillent actuellement sur un collyre qui pourrait changer la vie des myopes et des hypermétropes.
Dans quelques années, les personnes myopes, qui voient mal de loin, ou hypermétropes, qui voient trouble de près, pourront peut-être se passer de lentilles de contact ou de lunettes de vue. Une start-up israélienne a en effet testé avec succès sur la cornée de porcs un collyre capable de soigner les troubles de la vision.
La technique, mise au point par des chercheurs de l’université de Tel Aviv et de Jerusalem en Israël, utilise l’association de gouttes contenant des particules de l’ordre du nanomètre, plus petites que les cellules humaines, et d’un laser optique. L’équipe de David Smadja, ophtalmologiste au Centre médical Shaare Zedek à Jérusalem, est partie de l’hypothèse suivante : modifier le trajet de la lumière sur la cornée permettrait de rétablir la vision. En pratique, le laser ophtalmique créerait de minuscules trous sur la surface de la cornée en respectant un tracé sur-mesure, adapté à chaque patient. Les gouttes oculaires composées de nanoparticules viendraient ensuite combler ces cavités pour conduire la lumière, réparer la cornée et améliorer la vision. Pour l’heure, les chercheurs estiment que les effets de ce collyre correcteur pourraient durer une semaine. Les essais sur l’homme devraient débuter en 2021.
C’est pour aujourd’hui : une correction de nuit fait déjà ses preuves
Si les gouttes du futur se font encore attendre, une autre innovation pourrait devenir une réelle alternative au port des lunettes ou à l’opération chirurgicale. Il s’agit de l’orthokératologie. Au même titre qu’une orthèse qui compense un muscle ou une articulation déficitaire, et stabilise un segment corporel pendant une phase de réadaptation ou de repos, l’orthokératologie fait appel à une lentille de contact qui « répare » la cornée pendant la nuit. Pendant le sommeil, cette lentille rigide, fabriquée sur mesure, aplanit légèrement la cornée et comprime mécaniquement certaines cellules. Au bout de quelques heures, la cornée est remodelée et la myopie est corrigée de sorte qu’au réveil, les personnes peuvent se passer de leurs lunettes pendant 15 à 20 heures.
Une innovation pour qui ?
L’orthokératologie ne s’adresse qu’aux aux personnes présentant une myopie faible ou moyenne, soit inférieure à -5 dioptries ou astigmates, jusqu’à -1,5 dioptries. Cette technique est contre-indiquée chez les personnes présentant une malformation de la cornée, un kératocône, des grandes pupilles, une faible quantité de larmes… Votre ophtalmologiste saura vous dire si vous y êtes éligible. Pour les enfants dès 8 ans, cette solution offre des perspectives à plus long terme car l’orthokératologie limiterait la progression de leur myopie. Plusieurs études l’ont d’ailleurs déjà démontré. Ainsi, en suivant 100 enfants âgés de 6 à 10 ans à Hong Kong, entre 2010 et 2012, des chercheurs ont montré que ces lentilles avaient permis de réduire la progression de leur myopie de 43 %, comparé au port de lunettes classiques. Des données confirmées depuis par une méta-analyse publiée en mars 2015. Quant au risque d’infection, souvent mis en avant par les plus sceptiques, il ne serait finalement pas supérieur à celui des lentilles souples portées en journée. Les retours d’expérience sont donc globalement positifs, comme en témoignent les premiers ophtalmologistes français à avoir utilisé ces lentilles. Aujourd’hui, des études sont en cours pour s’assurer de la pérennité de la méthode, et les scientifiques travaillent sur la performance de ces lentilles. Un frein à souligner : la prescription et l’utilisation de ces lentilles nécessite des visites très régulières chez l’ophtalmologiste, tous les jours les premières semaines de traitement, puis toutes les 48 h le temps d’adapter parfaitement le produit à l’œil…
En attendant, les Etats-Unis et l’Asie commencent à adopter largement l’orthokératologie. En Europe, se sont les Pays-Bas qui se trouvent en pointe : près de 70 000 personnes y auraient déjà recours. En France, ces lentilles de nuit font encore figure d’exception : environ 1 500 paires sont vendues chaque année. •
Quelques chiffres
- 40 % des français sont myopes, contre 20 % dans les années 70. Source : Kings College de Londres
- L’orthokératologie représente 1 à 2 % des prescriptions de lentilles de contact. Source : Opticiens Krys
- D’ici 2050, 5 milliards de personnes seront myopes, soit la moitié de la planète. Source : Ophtalmology
Par Tina Géréral





