Christiaan Eijkman était un médecin et pathologiste néerlandais. Une observation fortuite de ses poules le conduira à la découverte de la vitamine B1 et au prix Nobel.
Christiaan Eijkman naît en 1858 aux Pays-Bas. Après des études de médecine à l’école militaire d’Amsterdam, le médecin et pathologiste rejoint l’armée hollandaise. À la suite d’une courte mission dans les Indes orientales, colonie néerlandaise, Christiaan Eijkman tombe malade. Il retrouve donc l’Europe et fait ses armes dans le laboratoire de bactériologie de Robert Koch, immense médecin allemand, et concurrent officieux de Pasteur, à l’origine de la découverte du bacille de Koch, agent infectieux de la tuberculose.
Les ravages du béribéri
À la fin du XIXe siècle, les Indes orientales sont ravagées par le béribéri, un mal encore mystérieux qui se caractérise par des troubles nerveux d’origine polynévritique. Connu depuis la Chine ancienne, le béribéri signifie « je ne peux pas, je ne peux pas » en cinghalais, marquant l’intense fatigue et la paralysie que ressentent les malades.
Le gouvernement hollandais décide donc de dépêcher une mission scientifique dans ses colonies, à laquelle vient se greffer Christiaan Eijkman. Dans toute l’Europe, la fin du XIXe siècle est marquée par l’avènement de la bactériologie. C’est donc naturellement que les directeurs de la mission s’orientent vers une piste infectieuse pour expliquer la propagation du béribéri. Ils arrivent même à isoler ce qu’ils pensent être l’agent infectieux de la maladie et quittent Java en laissant Eijkman finir leurs travaux. Seulement, le médecin a beau répéter les expériences, inoculer l’agent à des animaux sains, rien n’y fait. Eijkman abandonne la piste infectieuse.
La découverte de la vitamine B1 dans le riz
C’est fortuitement qu’il découvrira l’origine du béribéri. En effet, il remarque par hasard que certaines poules utilisées pour ses recherches développent des symptômes proches des troubles nerveux polynévritiques humains. Christiaan Eijkman enquête, décryptant les détails les plus anodins de la vie des poules. Il découvre ainsi que le régime alimentaire de certaines poules a été modifié quelque temps auparavant. Alors qu’elles se nourrissaient normalement de riz complet, considéré comme moins noble, elles mangeaient désormais du riz blanc, par erreur, semble-t-il.
Le Néerlandais fait alors une hypothèse : la cuticule du riz possède une substance qui empêche de développer le béribéri. Il pense d’abord que la maladie est provoquée par une toxine présente dans le riz blanc, et dont la toxicité est inhibée par une antitoxine présente dans la cuticule. Lorsque les poules mangeaient à nouveau du riz complet, les symptômes de la maladie s’estompaient. Le biochimiste Kazimierz Funk révélera plus tard que le béribéri est en réalité une carence en vitamine B1, présente dans la cuticule du riz.
Médicament essentiel
Cette découverte vaudra à Eijkman le prix Nobel de médecine en 1929. La mise en lumière du rôle du riz complet a certainement sauvé des milliers de vie. On sait désormais que le béribéri est causé par une carence en thiamine ou vitamine B1 ou aneurine. Cette vitamine est désormais classée dans la liste des médicaments essentiels par l’Organisation mondiale de la santé.
Aujourd’hui encore, le béribéri frappe toujours, essentiellement dans les pays les plus pauvres. En 2004 à Mayotte, un béribéri infantile a entraîné la mort d’une vingtaine de nourrissons, à cause d’une carence en vitamine B1 pendant la grossesse et l’allaitement. En Indonésie, Eijkman a donné son nom à un institut de recherche de biologie moléculaire. Un cratère lunaire porte aussi son nom.
Par Léa Galanopoulo