En hausse depuis plusieurs années, la perte de progressive de l’audition liée à l’âge est la cause la plus fréquente de surdité chez les plus de 50 ans. Un problème de santé parfois négligé, qui peut être source d’isolement social chez les plus âgés.
466 millions. C’est le nombre de personnes qui souffrent de déficience auditive incapacitante selon une estimation de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) communiquée à l’occasion de la journée mondiale de l’audition, le 3 mars dernier. Un chiffre en perpétuelle augmentation depuis plusieurs années, et qui pourrait encore croître. En effet, toujours d’après l’OMS, si aucune mesure n’est prise, notamment en matière de prévention et de diagnostic précoce, c’est 900 millions de personnes qui pourraient être concernées par la surdité d’ici 2050. Soit près d’un dixième de la population, conformément aux projections démographiques. En cause notamment, l’augmentation de la population mondiale et la proportion accrue de personnes âgées.
Presbyacousie ou baisse de l’audition liée à l’âge
En termes de mécanismes, deux types de surdités sont distinguées : de transmission ou de perception. Comme le laisse présager son nom, la surdité de transmission provient d’un problème de transmission du signal sonore dans l’oreille. Elle peut être causée par une malformation congénitale de l’oreille, mais peut aussi être la conséquence d’un blocage mécanique, suite à une infection ou un bouchon de cérumen. La surdité de perception concerne, elle, l’oreille interne ou le nerf auditif. Les causes sont variées : surdité génétique, exposition au bruit intense, infection de l’oreille interne, médicament toxique… ou vieillesse. En effet, la plus fréquente des surdités de perception est celle liée au vieillissement naturel de l’oreille : la presbyacousie. En moyenne, elle se traduit par une perte auditive de 0,5 décibel par an à partir de 65 ans un décibel par an à partir de 75 ans et deux décibels par an à partir de 85 ans. La presbyacousie n’exclut pas pour autant d’autres causes simultanées de baisse auditive. Il est d’ailleurs possible qu’une surdité soit mixte et associe à la fois un problème de transmission et de perception. Ce sont les examens réalisés par le médecin ORL qui permettent de faire la distinction entre les deux mécanismes.
Plusieurs facteurs de prédisposition
Bien qu’elle soit un phénomène naturel lié au vieillissement, la presbyacousie peut s’installer plus rapidement et plus intensément chez certaines personnes. En effet, des prédispositions génétiques, recensées dans plusieurs familles, ainsi que la prise de médicaments particuliers, dits ototoxiques (voir encadré), peuvent contribuer à son apparition et à son aggravation. Le diabète et l’artériosclérose, dépôt de cholestérol dans les vaisseaux, sont également cités parmi les facteurs de prédisposition pour leur effet néfaste sur la circulation sanguine au niveau de l’oreille interne. Ainsi, les personnes qui souffrent d’hypercholestérolémie, d’hypertension artérielle ou qui fument sont plus exposées à une baisse de l’acuité auditive. Enfin, pas encore clairement établi, le rôle de l’exposition chronique aux bruits intenses est très fortement suspecté, tout comme l’influence des baladeurs écoutés à des volumes trop élevés.
Repérer les premiers signes
Parce qu’elle apparaît de manière progressive, la baisse de l’audition liée à l’âge est un phénomène assez difficile à mettre en évidence. Pourtant, certains signes, comme des difficultés de compréhension de la parole en milieu bruyant ou la nécessité de faire fréquemment répéter son interlocuteur lors d’une discussion, peuvent être évocateurs. Les repérer est important, afin d’engager le plus rapidement la démarche diagnostique auprès d’un médecin ORL, qui évaluera alors de manière précise la perte d’audition ainsi que les solutions adaptées pour améliorer le confort de vie. Par ailleurs, il peut être judicieux de faire estimer régulièrement son audition à partir de 60 ans, y compris en l’absence de signes notables de surdité. En effet, sans prise en charge adaptée, il est fréquent que la personne qui souffre de presbyacousie s’isole progressivement pour ne pas être confrontée à ses troubles auditifs et développe peu à peu des symptômes dépressifs combinés à une désocialisation. Ce repli majore l’impact de la surdité sur la qualité de vie, en particulier chez les personnes de plus 80 ans.
Une grande variété d’aides auditives
La prise en charge de la presbyacousie repose sur la mise en place précoce d’aides auditives adaptées aux patients. Elles seront plus efficaces et mieux supportées lorsque la baisse de l’audition n’est pas encore trop importante. Notion malheureusement peu assimilée en France, puisque le taux d’appareillage des personnes atteintes de presbyacousie est faible, et une vaste majorité de patients ne profite pas des bénéfices apportés par ces aides. Pourtant, il en existe désormais une grande variété, des plus discrètes au plus sophistiquées, équipées, par exemple de la technologie Bluetooth ou capables d’atténuer les bruits parasites. Une période d’adaptation de quelques semaines à quelques mois, au cours de laquelle s’effectue une acclimatation aux sons tels qu’ils sont transmis par l’aide auditive, est à prévoir. Par conséquent, des rendez-vous dits « d’adaptation » sont prévus par les audioprothésistes au cours de ces premières semaines.
Un remboursement forfaitaire
Si elles sont inscrites sur la liste des produits et prestations remboursables par l’Assurance Maladie et font l’objet d’une prescription médicale, les prothèses auditives sont prises en charge à 60 % par la Sécurité Sociale sur la base de tarifs officiels, variables selon l’âge et le handicap. Cette prise en charge comprend l’achat de l’appareil, mais également des accessoires nécessaires (piles, embout, coque…), la prise en charge par l’audioprothésiste, qui réalise l’appareillage et l’adaptation de la prothèse auditive ainsi que l’éducation et le suivi prothétique régulier, essentiels pour bien manipuler et entretenir l’appareil. Par ailleurs, la part des frais non prise en charge par l’Assurance Maladie peut l’être par une mutuelle ou une assurance complémentaire santé en fonction du contrat souscrit. Enfin, les frais d’entretien sont également pris en charge par l’Assurance Maladie sur présentation des justificatifs de dépense, toujours sur la base d’un forfait annuel fixé à 36,59 euros par appareil.
Attention à certains médicaments !
Certains médicaments peuvent être responsables d’une baisse de l’audition. Ces traitements dits ototoxiques, s’attaquent aux cellules ciliées de l’oreille interne et génèrent une surdité de perception unilatérale ou bilatérale.
Les symptômes peuvent être d’apparition brutale, mais peuvent aussi apparaître progressivement ou après une période de latence de quelques années, ce qui rend presque imperceptible le lien de cause à effet pour les médecins. Plusieurs familles thérapeutiques sont citées : antibiotiques, antipaludiques, antiviraux, anticancéreux, médicaments cardiovasculaires, des troubles de l’érection…
Ainsi, toute personne présentant des troubles auditifs, avec ou sans perte auditive associée, ne doit pas omettre de le préciser à son médecin à chaque nouvelle prescription, afin de prévenir tout risque.
Prévenir et limiter une perte d’acuité auditive
- Nettoyez vos oreilles à l’eau et au savon. Évitez d’utiliser un coton-tige, car il peut favoriser la formation d’un bouchon de cérumen.
- Ne vous exposez pas au bruit de façon prolongée : son intensité et la durée d’exposition sont toutes les deux fortement suspectées dans la survenue et l’aggravation de la surdité. Utilisez des protections antibruit, comme des bouchons d’oreilles, lorsque l’éviction est impossible.
- Si vous utilisez des écouteurs : réglez le volume dans un endroit calme à la moitié du volume maximum, privilégiez les casques et limitez votre durée d’écoute.
- En discothèque : éloignez-vous des enceintes et faites des pauses dans un endroit calme toutes les deux heures. – Si une perte d’audition est diagnostiquée, faites surveiller son évolution chaque année.
- 65 % des plus de 65 ans sont concernés par une perte d’audition (source Inserm)
Julien Dabjat